par Phantom_Blue » 31 Jan 2008, 09:35
DRIMS saison 2
Episode 10
Il faut changer les lettres sur le toit. Et ça se répercutera sur le supermarché. Avec GRATOS tout était gratuit. Avec RATOS, on a eu droit aux rats. C’est du moins ce que je pensais. De toute façon je voyais que ça. J’en fis part aux autres.
— Mais oui ! s’exclama BB-lilith. Comment ça se fait que j’y ai pas pensé !
— Blue, t’es trop fort ! chanta Sandra, des étoiles dans les couettes.
Enilis haussa les épaules et souffla un « pffff » de chatte qui crachote les plumes d’un zoizeau dégusté avec un sadisme affamé au comble de la jouissance d’un ronronnement orgasmique.
On pouvait monter sur le toit dans l’entrepôt, grâce à une échelle. BB-lilith passa en premier, elle tenait à ce qu’on reste groupé. Sandra suivit, puis Enilis qui me cracha quand je montai derrière elle :
— Blue, arrête de mater ! Grrr !
— Ben, euh, quoi ? que je m’étonnai.
Ah oui ! Les shortys rebondis. Glurps ! (La goutte).
La vue était magnifique sur la campagne. Les champs s’étalaient à perpète sous un ciel bleu. Les nuages prenaient toutes sortes de formes. Y’en avait même un avec des couettes.
— Y’a d’autres lettres, indiqua Enilis en les montrant par terre. On peut écrire n’importe quel mot.
Oui, mais quel mot il fallait écrire ?
— SORTIE DRIMS, proposa BB-lilith.
On enleva les lettres RATOS LAND sur le long support en métal, qui pouvait accueillir une vingtaine de lettres, et on posa celles de SORTIE DRIMS. Puis on descendit voir dans le supermarché.
Un tourbillon circulaire tourbillonnait au-dessus des rayons.
— C’est le vortex ! que je m’exclamai. Reste plus qu’à entrer dedans.
Sandra nous devança et escalada un rayon en trois enjambées, le shorty nerveux.
— Pas si vite ! lui cria BB-lilith. Attends !
Mais elle n’écouta pas, se plaça devant le vortex et tenta d’y entrer.
— Ça marche po ! qu’elle nous lança. C’est bloqué !
— Putiiiin ! Sandy, j’ai pourtant dit qu’on devait rester groupé ! T’imagines si le vortex t’avait avalée ? Comment on aurait fait pour te retrouver ?
Sandra afficha un air déconfit de Sandra déconfite.
— C’est sûrement pas les bons mots, que je dis.
— Presque, répliqua Enilis, puisqu’il y a le vortex.
Décidément, celle-là , fallait toujours qu’elle me contredise.
Sandra nous regarda du haut du rayon, les couettes flamboyantes roses sous les néons.
— Ben faut écrire quoi alors ?
Quand le lutin apparut au détour du rayon.
— Hep ! que je lui criai.
Il se ramena en trottinant, s’arrêta à deux mètres, loucha d’une paire de zoeils globuleux et humides sur les shortys de BB-lilith et Enilis.
Je demandai, en misant sur le fait qu’il devait savoir :
— Il faut écrire quoi comme mot sur le toit pour sortir de DRIMS ?
Il me répondit sans quitter les shortys des yeux :
— Le mot se trouve sur le poster de Yuu du magazine Pink Japon.
Sa langue slurpa saliveuse dans sa bouche et il se barra en trottinant.
Sandra sauta sur le sol dans un double clac de semelles de rangeos.
Tous les regards se tournèrent vers Enilis.
— Gasp ! qu’elle gaspa, la Nini.
Je savourai cet instant merveilleux.
BB-lilith me posa la question :
— Dis, Blue, tu te souviens pas d’un mot sur le poster ?
Je cogitai soutenu, visualisait Yuu, les lolos de Yuu, le nombril de Yuu, les jambes de Yuu, le nombril de Yuu, les lolos de Yuu, les jambes de Yuu, les lolos de Yuu, le nombril de Yuu…
— Euh, ben non, sur le coup-là , je vois pas.
— Ben on a qu’à écrire PINK JAPON ! s’exclama Enilis.
Purée, celle-là , qu’elle se la ramène pas trop, sinon elle va m’entendre.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Virée speed sur le toit. Retour dans le supermarché. Stupeur foudroyante. Tous les rayons étaient remplis de magazines de charmes japonais. Les couvertures éclataient de mille couleurs et de japonaises plus ou moins dénudées. Je constatai que le vortex avait disparu.
— Le paradis pour Blue, qu’elle ricana, la Nini.
Je pfifai en haussant les épaules.
Restait plus qu’à chercher.
Au bout de cinq minutes, je tournai des zoeils. Normal, trop d’émotions.
— On y arrivera jamais, dit BB-lilith, y en a de trop. Et si ça se trouve, y a même pas celui qu’on cherche. Mais j’y pense, il doit rester les morceaux déchirés du poster dans la cabine.
— Ben ouiiii ! Saperlipopette ! chanta Sandra. On n’a qu’à les reconstituer et on trouvera le mot !
Sprint général vers les cabines d’essayage. Au passage je louchai sur les couvertures. Ben pour voir si je voyais Pink Japon. Ben non je mate pas ! M’enfin !
Déception fatale ! Rien dans les cabines. Pas le moindre bout de poster sur le sol.
Retour sur nos pas. Quand on vit une femme de ménage en blouse qui poussait un chariot avec une grande poubelle, des seaux, des brosses et des balais.
Tout le monde avait fait le rapprochement. Elle avait dû balayer les bouts du poster juste avant. Il se trouvait donc dans la poubelle.
— Madame ! cria Sandra en fonçant vers elle.
La femme se retourna.
— Un travelo ! fonça Sandra en criant vers elle.
BB-lilith balança d’une voix proche de l’hystérie vocale :
— C’est Charlyyyyy ! Attrapez-le !
Devant nos zoeils effarés, la femme-travelo-Charly sauta dans la poubelle. On se rua vers le chariot.
Les couettes penchées au-dessus de la poubelle vide, Sandra glapit :
— Saperlipopette ! A quelques secondes près ! Et comment tu sais que c’était Charly ?
— A votre avis ? dit BB-lilith.
On aurait dû retenir le lutin pour le faire parler. Sandra à coups de baffes dans les dents, elle a une longue expérience avec Kisshu. Enilis en lui tordant les coucounettes. L’image me fit froid dans le dos jusque dans le slibard. Non, après tout, par solidarité pour les mecs, valait mieux pas.
BB-lilith proposa d’écrire JOHN LENNON, en pensant qu’il apparaîtrait.
Tous les albums vinyles, CD, DVD et bouquins sur John Lennon remplirent les rayons.
— Pfffff ! souffla Sandra. Je deviens dingo !
Aucun risque, la gamine l’était déjà .
— Hééé ! Attendez ! qu’elle envoya soudain, la Sandinette. Et si on écrivait PETITES CULOTTES ? Ben oui, vu qu’on en a plus, ce serait bien d’en avoir de nouveau.
Au moins un million de petites culottes se matérialisèrent dans les rayons.
Il n’y avait que l’embarras du choix. Et quand il y a l’embarras du choix, avec les filles qui choisissent, ça peut durer des lustres. Je patientai, les bras croisés, en louchant les néons. Ben oui, euh, c’est plutôt gênant pour un mec de coller ses zoeils masculins sur des petites culottes de filles exposées à tous les regards.
Je pensai au lecteur DVD dans ma chemise (ultra plat de la taille d’un DVD pour répondre à une remarque, la personne se reconnaîtra), au film « Les RE girls contre-attaquent ». Peut-être qu’on devrait prendre le temps de voir les autres chapitres. On apprendrait…
Et c’est là que je sentis un vide sous ma chemise. Le lecteur DVD et le DVD avait disparu. Ils s’étaient volatilisés. Il ne restait que le magazine. Peut-être qu’ils avaient une durée de matérialisation limitée. Je préférai ne rien dire aux autres. Il serait encore temps de leur donner l’info.
Sandra déboula hors de la cabine, dégaina ses deux guns et cracha :
— Le premier qui me demande encore ma petite culotte, je le rafale sans pitié ! Grrrr !
Des têtes de zombies éclatées par des balles dans des gerbes de sang brillaient dans ses yeux de collégienne innocente.
— On a qu’à en prendre quelques-unes au cas où, dit BB-lilith, vu que c’est la monnaie d’échange officielle de DRIMS. Blue, prends-en aussi deux ou trois !
Hein ? Euh… Glurps ! Toucher des petites culottes de filles… Transpiration… Tremblement dans le bout des doigts… Hésitation…
Enilis rigolait comme une vieille fouine. Même qui y a des vieilles fouines qui doivent rigoler comme Enilis. Va savoir.
On réfléchissait sur le toit aux mots à écrire. Le ciel était toujours aussi bleu. La campagne s’étendait toujours à perte de vue. Quand Sandra s’écria :
— Là -bas, des gros lapins avec des cornes !
— Des rennes, rectifia BB-lilith, et quatre rennes. Mais ouiiii ! D’hab il y a huit rennes qui tirent le traîneau du père Noël. Il y en avait que quatre, vous vous souvenez ? Et là ce sont les quatre autres.
Le regard de BB-lilith croisa le mien. Elle avait pensé à la même chose que moi.
On descendit speed du toit.
Les rennes broutaient relaxes, leurs grandes dents mâchouillant l’herbe. Ils étaient tous les quatre scellés, comme s’ils nous attendaient.
Plutôt bizarre qu’ils se pointent juste au bon moment. D’un côté on se faisait faucher le poster sous notre nez, vraisemblablement par Charly, de l’autre on nous offrait quatre rennes sur un plateau, peut-être Yakari, ou Fleur. Snif, Fleur, petite capucine mutine au doux sourire enchanteur, où es-tu ? Toi que j’aurais aimé à la folie, snif !
— Ben voilà , dit BB-lilith en tapotant la croupe d’un renne. On n’a plus qu’à monter dessus.
— Hein ? fit Sandra.
— Ben oui, clapota Enilis, ils nous conduiront bien quelque part. C’est logique, m’enfin !
— Oui mais où ? demanda Sandra.
D’un petit bond BB-lilith se retrouva sur le dos du renne.
— On verra bien, je suis sûre qu’ils savent où nous emmener. Allez, tout le monde en selle !
— Ils m’inspirent pas trop confiance, bavota Enilis. Celui-là me regarde d’un drôle de zoeil globuleux.
Normal, il doit capter le danger. Avec Nini c’est toujours risqué rien qu’en se tenant à deux mètres d’elle. Alors quand on l’a sur le dos…
Pas désagréable de voler avec un renne. Ça se laisse conduire. Bon, OK, il faisait tout le boulot. Mais ça donnait quand même un sentiment de puissance infinie de survoler le monde. Enfin les champs. Les autres filles avaient l’air de s’éclater. Sauf Enilis qui se cramponnait à la crinière. Pauvre renne, que d’angoisse traumatique devait bouillonner dans son ciboulot de renne avec Nini sur son dos.
Je me demande comment on allait sortir quand un brouillard se dessina à l’horizon. Les quatre rennes virèrent vers lui. En quelques secondes, on se retrouva dedans. Ils avaient parcouru la distance en un éclair.
Je ne distinguai plus les autres. Quand le brouillard se dissipa, et je vis de nouveau les filles.
Les rennes se laissèrent tomber en piqué et se posèrent devant l’Académie. Un jour éclatant baignait le ciel. Des love girls se baladaient dans le parc, certaines au bras de zombies.
— Saperlipopette ! cracha Sandra en descendant de son renne. On est de nouveau chez les pouffettes folles de zombies !
— Ouais, grommela Enilis. Retour à la case départ ! Blue, arrête de mater !
Décidément, la Nini, elle a toujours un zoeil dirigé sur mes zoeils pour voir ce que je vois. Elle m’énerve, elle m’énerve, elle m’énerve. Elle traumatise ma liberté de garçon zindépendant.
Les rennes piquèrent un petit sprint, les sabots excités, et s’envolèrent dans le ciel.
Deux love girls descendirent l’escalier en discutant. Mimi les jupettes vues en plongée.
— La barbe cette coupure d’électricité, dit l’une d’elle. Tu crois qu’ils vont réparer vite ?
— Ouais j’espère, répondit l’autre. On peut pas surfer sur le Net.
Elles s’éloignèrent dans l’allée. Je sursautai, because le coude d’Enilis logé dans mes côtes flottantes. Gasp !
Les karts étaient garés plus loin sous un préau.
— Y’a un annuaire à l’arrière du mien, s’étonna Enilis.
— Comme si on l’avait mis là exprès, dit Sandra.
BB-lilith le prit et feuilleta les pages.
— Et si ce que je crois est vrai…
— Quoi ? demanda Sandra, les couettes attentives.
— Une seconde… Bingo !… Devinez qui est dans l’annuaire ? Je vous le donne en mille !
Penny Lane, son bar à vins, sa boutique de fringues à la déco peace and love, son barber shop, en fait c’était une rue tout ce qui y a de plus banale. Moi qui imaginais un délire psychédélique d’après la chanson des Beatles. On doubla un autobus à impériale vert à l’arrêt.
Sandra : Vous avez vu l’autobus ? On pourrait l’utiliser pour sortir de DRIMS.
BB-lilith : Je pense pas que ça marcherait.
Sandra : Ah oui, et pourquoi ?
Enilis : Ben oui, pourquoi ?
BB-lilith : A mon avis, on ne peut plus. Les rennes qui nous conduisent à l’Académie, l’annuaire bien en évidence, c’est pour nous orienter dans une direction précise.
Blue : Ben oui, ils savent qu’on va filer à Penny Lane, ils savent qu’on sait pour les autobus, ils ont dû bloquer le système.
Sandra : Qui, ils ?
Blue : Yakari, Charly…
Sandra : Ah ouais, c’est vrai ! Saperlipopette !
Enilis : Des fois t’es dans la lune, Sandy, arrête de penser au zamour.
Sandra : Oh toi ça va, la déchireuse de poster !
Enilis : Grrrr !
BB-lilith : C’est là , on y est !
On stoppa les karts devant la jungle house, appelée comme ça à cause de sa face zébrée.
BB-lilith loucha sur les sonnettes de l’entrée.
— C’est au premier.
On gravit un escalier qui sentait la cire.
BB-lilith sonna. Attente. Resonna. Attente.
Sandra dégaina un gun et allait taquiner la serrure avec une balle, quand BB-lilith la retint.
— Non, attends !
Elle tourna la poignée de la porte. C’était ouvert.
Sandra rengaina à contre-cœur. Le manque de rafalage de zombies devait torturer son esprit de killeuse. C’est une fille, si elle n’appuie pas sur la gâchette au moins une fois au petit dej, ne serait-ce que pour loger une balle dans le ciboulot d’une peluche, la journée devient morose, blafarde, inexistentielle. La vie perd tout intérêt, ses couettes se fanent.
Il y avait juste une grande pièce éclairée par deux fenêtres. Un piano à queue blanc occupait un coin. Des posters des Beatles s’alignaient sur les murs.
Je m’installai devant le clavier et jouai les premières mesures de Yesterday.
— Ouaaah ! s’écria Sandra. Blue il joue du piano. Trop bien !
— Ouais, bon, crachota Enilis, arrête la romance, on n’a pas que ça à faire.
La voix autoritaire de BB-lilith bouscula les molécules bullantes de l’oxygène.
— Ben alors, vous fouillez ?
— Mais on cherche quoi ? demanda Sandra.
— Le gun de John, bon sang, Sandy, t’as la tête où ? Et si vous trouvez des balles, vous les prenez aussi !
— Oups ! Excuse !
Enilis ricana sordide :
— Décidément, t’es en manque de kiss ou quoi ?
— Oh toi ça va ! La ramène pas trop ! répliqua Sandra. Si t’avais pas déchiré le poster de Blue, on serait déjà dehors.
— Pas sûr, interrompit BB-lilith. Vu les tournures que prennent les choses, y a toujours un truc qui fait obstacle.
Sandra fouillait à côté d’un fauteuil quand elle exhiba une partition qui traînait en dessous.
— Hééé, Blue, y a une chanson qu’elle s’appelle « Blue for you » ! Marrant ! Tu pourrais la jouer ?
Enilis haussa les épaules.
Elle me l’apporta. Il y avait juste la mélodie, aucun accord.
do do do… do si la… do si la… do si… la do si la… do do… mi ré do la… sol sol sol sol sol… fa mi ré… do si la…
Je jouai en rajoutant des accords.
— Ouaaah ! s’émerveilla Sandra, accoudée contre le piano. C’est trop beau ! Snif !
— Ben alors ? gueula Enilis. Vous aidez ou quoi ?
Décidément, la Nini et le romantisme, c’est Alien vs Predator Ultimatum Final.
Quand BB-lilith poussa un cri de fille et brandit le magazine Pink Japon.
— Je le crois pas, gargouilla Enilis, il est aussi obsédé de Japonaises que Blue.
— Normal, que je lançai, il est quand même maqué avec Yoko Ono.
— Ben si elle savait que son John il reluque des Japonaises toutes nues, se gaussa Enilis. Les mecs, tous les mêmes ! Y’en a pas un pour racheter l’autre ! Pffffff ! Beurk !
Je m’abstins de toutes remarques.
BB-lilith loucha le poster déplié, le pif à deux centimètres dessus.
Sandra et Enilis attendaient, les couettes savonnées par le shampooing du suspense, pendant que mes doigts continuaient à faire naître « Blue for you ».
— Bingo ! s’écria BB-lilith. J’ai le mot. Vous ne devinerez jamais !
— Ben quoi ? s’impatienta Sandra.
— C’est EXIT !
Sandra tourna deux zoeils furibards vers Enilis.
— Grrrr ! Nini ! Grrrrrrrrrrr ! A cause de toi on serait dehors !
Et elle se jeta sur elle.
Ça y est, c’était reparti pour un tour. Je pensai à les séparer, mais comme BB-lilith ne bougeait pas. Et puis des fois il faut laisser s’exprimer les djeunes. La communication n’est-elle pas la base de toute forme de vie civilisée ? Le dialogue est la brique de l’édifice social.
Il contribue à établir des relations saines et positives.
— Je vais lifter ta petite gueule de lycéenne ! Grrrr !
— Si tu crois qu’une collégienne zamoureuse d’un farfadet lubrique me fait peur ! Grrrr !
— T’as dit quoi là ? D’abord Kisshu est pas un farfadet, c’est un Cyniclon de l’espace !
— Toi aussi t’es space !
Pendant qu’elles se secouaient les couettes, je jouai « All you need is love ».
BB-lilith continuait à fouiller, mais apparemment le gun ne se trouvait pas là . C’est même pas dit que John était revenu ici. Le mieux aurait été de retourner au supermarché pour placer EXIT sur le toit. Oui mais comment ?
Je sursautai. Mes doigts se figèrent à un demi-centimètre des touches. Sandra sursauta en même temps et arrêta de secouer les couettes d’Enilis. Qui arrêta de secouer les couettes de Sandra en sursautant.
BB-lilith tenait un de ses guns à la main, le canon braqué sur le plafond. La balle avait éclaté un bout de plâtre.
— Je demande votre attention.
Euh, je voudrais pas être son petit copain affalé sur le canapé devant un match de foot à la télé avec une canette de bibine dans les doigts pendant qu’elle annonce que le dîner est servi. Mais non, impossible. Le mec serait à la cuisine en train de préparer le dîner, la miss Lili vautrée sur le canapé devant « Desperate housewives » ou « Sex in the City ».
Elle rengaina le gun, nous montra une affichette trouvée sur des livres sur une étagère de la biblio, et articula :
— Les GO!GO!7188 vont donner un concert à l’Académie.
Sandra lâcha les couettes d’Enilis
— Ouais, et alors ?
Enilis lâcha les couettes de Sandra. Chantonna narquoise :
— Yuu c’est la chanteuse du groupe, la chérie de Blue.
Je haussai les épaules en pfifant.
— Ouais, et alors ? demanda Sandra.
Enilis posa la même question.
— Le concert a lieu aujourd’hui.
— Au fait, que je précisai, on est quel jour ici ?
— Ah ouais ? s’interrogea Sandra. C’est vrai, on a jamais pensé à ça.
— Y’a une date marquée dessus ? demanda Enilis. Comment tu sais que c’est aujourd’hui ?
BB-lilith montra l’affichette et le « aujourd’hui » sous « concert ».
Evidemment, si y’a marqué « concert aujourd’hui », c’est aujourd’hui. Faut pas chercher à comprendre. Surtout dans DRIMS.
— On file à l’Académie, claqua sec des dents BB-lilith, je vous expliquerai en route. Blue, prends la partition « Blue for you » !
Elle retira le poster du magazine, le plia et le fourra dans son shorty.
Aaaaah d’accord ! J’avais capté ! Euh, enfin je crois. Peut-être pas.
Les karts roulaient speed sur la route.
Sandra : Pourquoi on retourne à l’Académie ?
Enilis : Je crois que je commence à comprendre. Il faut prendre la guitare de Yuu.
BB-lilih : Exact.
Sandra : Et alors ?
BB-lilih : La guitare nous permettra de sortir de DRIMS en jouant le morceau « Blue for you ».
Sandra : Saperlipopette de saperlipopette !
Ah oui, là je crois que j’ai compris.
Enilis : Mais t’es sûre ?
BB-lilith : Presque. A 99%.
Soudain les filles freinèrent brutal.
Vu que je les suivais, j’appuyai sur la pédale de frein. Mais pas assez vite. Je percutai l’arrière du kart d’Enilis. Ses couettes flapotèrent. Sûr que ses lolos avaient dû chalouper dans le soutif. Elle se retourna, visiblement pas contente.
— Grrrr ! Blue ! qu’elle grogna.
Un grand rat noir se tenait au milieu de la route, dressé sur ses pattes arrière, agitant ses pattes avant.
— Je suis Cromwell, vous vous souvenez de moi ? (voir saison 1, épisode 11). Il faut que vous m’aidiez à reprendre le commandement des rats ! Un hamster diabolique du nom de Pouillu m’a attaqué et pris le pouvoir. Il veut conquérir DRIMS, puis le monde.
— On a autre chose à faire ! cracha BB-lilith. Dégage !
Elle démarra speed. Cromwell sauta sur le côté pour éviter les karts. Les autres filles démarrèrent à leur tour. Je les suivis dans la foulée. Jetai un regard à Cromwell. Plutôt amoché, un bout d’oreille en moins, des traces de morsures dans le poil.
Quelque chose me dit qu’on aurait dû l’aider, et que ça allait nous retomber sur le coin de la gueule.
On déboula plein gaz dans la grande allée de l’Académie.
Sandra : Dans le parc, vous avez vu ? Le kiosque à musique !
Une banderole attachée sur le toit en pointe indiquait : « CONCERT DES GO!GO!7188 » On pouvait pas la rater.
On coupa sur la pelouse.
Enilis : Je vois des guitares sur des trépieds !
BB-lilith ! On dirait la guitare du poster !
Sandra ! Ouuuaaaaiiiissss !
Blue : Y’a personne. Apparemment le concert n’a pas encore commencé.
BB-lilith : On a de la chance. Vite !
On stoppa devant le kiosque.
Sandra bondit en avant. Décidément, super excitée la gamine ! Je matai dans tous les sens. Pas de Yuu. Peut-être qu’elle était dans l’Académie.
Sandra loucha sur la guitare et cria :
— C’est bien celle-là ! Y’a marqué EXIT dessus !
Restait plus qu’à jouer « Blue for you ». Oui, mais une minute ! Si y a qu’une personne qui joue de la guitare, elle seule sort de DRIMS. Et les autres ?
BB-lilith devança ma question en blablatant le problème et la soluce :
— Il faut se tenir dans un rayon de 3 mètres autour de la guitare pour être téléporté.
— Comment tu sais ça ? que je demandai.
Elle déplia le poster.
— T’as vu, en bas, dans le coin, en tout petit ? Le cercle avec le 3M dedans ?
— A ouais !
— Le cercle représente le périmètre et 3M la distance, donc 3 mètres.
— Saperlipopette !
— Oui, mais t’es sûre ? demanda Enilis.
— Non, répondit BB-lilith, mais j’ai pas mieux.
C’est ce qu’on appelle flotter dans les vapes du gaz.
BB-lilith vérifia le branchement des câbles des amplis avec les prises dans la trappe.
— Tout est OK, hop ! Nini, à toi de jouer !
Euh, j’aurais voulu voir Yuu. Snif ! C’est po juste !
BB-lilith tourna le bouton power de l’ampli.
Rien.
Mais oui, bien sûr, la panne d’électricité. Y’a pas d’électricité. Peut-être même que le concert avait été retardé. Je le savais, y aurait un bug quelque part.
Hein ? Mais qui venait là -bas ? Yuu ! C’était Yuu ! Avec Akko, la bassiste, et Turkey, le batteur. Mon cœur se mit à battre la samba brésilienne.
Quand un zombie souriant, autant qu’un zombie souriant peut sourire, monta les marches du kiosque en lorgnant sur Sandra. Il tira une langue pustuleuse et baveuse hors de la cavité buccale, l’agita frénétique et articula d’une voix de gaufrette écrasée :
— Salut poulette, tu viens glourper avec moi ?
Inutile de consulter le dico français-zombie pour traduire le sens de ce verbe.
Je crus que Sandra allait exploser en un million de particules de couettes roses, de soutif, de shorty et de petite culotte.
Elle dégaina avant qu’on ait pu l’empêcher et tira une rafale sur le zombie.
Sa tête éclata dans un flagada d’hémoglobine poisseuse.
Tout bascule. Le jour défile en accéléré. S‘assombrit. Laisse place à une nuit éblouie par un clair de lune. Certaines fenêtres de l’Académie sont éclairées.
Et Yuu avait disparu. C’est po vrai ! Je suis maudit ! Si près du but ! Yuu, petite capucine mutine au doux sourire enchanteur, où es-tu ? Toi que j’aurais aimé à la folie, snif ! Hein ? Quoi ? Ben non, je ne leur dis pas ça à toutes ! Euh… Le bouton power de l’ampli était rouge lumineux.
— L’électricité est revenue ! s’écrie Sandra. Je suis trop forte ! Wouuaaaiiiissss !
— Et les zombies aussi, fit remarquer BB-lilith.
Je sais pas combien il y en avait autour du kiosque, mais suffisamment pour ne plus pouvoir distinguer la pelouse.
— Chouette, y a plein de zombies !
Inutile de dire qui prononça cette phrase. D’ailleurs ce fut aussi la première à rafaler.
Je reculai au milieu du kiosque. Oui, ben c’est pas mon boulot de flinguer des zombies.
Les canons crachèrent des bastos à donf. Je sais pas qu’elle était la plus déchaînée : Sandra ou Enilis.
Les zombies tombaient comme des mouches. Je sais pas si les mouches peuvent tomber comme des zombies. Bref.
Je notai le détail. Les filles ne rechargeaient jamais leurs guns. Elles devaient être en mode munitions illimitées (Oui, je sais, ça a déjà été précisé dans un épisode, mais moi je ne suis pas censé le savoir).
Le zombie avait enjambé la balustrade avec une rapidité incroyable. Le temps que je réalise, il s’empara de la guitare, sauta par-dessus la balustrade et se barra.
Les filles n’avaient rien vu. Elles continuaient de rafaler.
D’hab les zombies sont plutôt lents. Celui-là était plutôt nerveux. M’étonnerait pas que ce soit Charly. Il venait une nouvelle fois de contrecarrer nos plans.
— Ils décampent, dit Sandra.
— Ouais, confirma Enilis, je crois qu’ils ont compris.
BB-lilith rengaina ses guns.
— Bon, Nini, dépêche-toi ! Prends la guitare et joue la mélodie… Mais où est la guitare ?
Je racontai en quelques mots.
— Encore un coup de Charly, vociféra Enilis. Le jour où je le tiens, il va déguster.
— Euh, bégaya Sandra, c’est quoi tous ces points rouges qui avancent vers nous ?
Des milliers de rats, les babines retroussées, les dents menaçantes. Je reconnus Pouillu. Remarque, ç’aurait été difficile de le louper. Il portait des petites lumières clignotantes multicolores, un petit casque surmonté d’une petite pancarte lumineuse qui affichait : « I am god ».
— Ils sont trop nombreux, dit Enilis, on pourra jamais tous les rafaler.
— Et s’ils nous demandaient juste des petites culottes ? articula inquiète Sandra.
Il ne restait plus qu’un mètre entre l’océan des rats et le kiosque.
— Blue, t’as pas une idée ? demanda BB-lilith.
Si, j’aurais mieux fait de rester dans mon agence avec mes Japonettes.
Les premiers rats montèrent les marches du kiosque. Pouillu était resté en arrière. Pas con, la bestiole. On aurait pu le prendre en otage.
Les filles dégainèrent leurs guns. Les doigts allaient appuyer sur les gâchettes.
Quand un rectangle se dessina au milieu du kiosque. Et le visage d’Aeryn Sun apparut dedans.
— Vite ! cria-t-elle. Venez !
On s’engouffra tous dans le rectangle. Aeryn Sun le referma derrière nous.
Ainsi c’était ça, le central des écrans. Impressionnant. Des dizaines d’écrans flottaient dans un espace gris clair.
— Mais pourquoi t’as pas donné signe de vie ? demanda BB-lilith.
— Mon oreillette ne marchait plus. Et j’ai mis du temps à trouver l’écran sur lequel vous étiez. Il y en a des centaines.
— Bizarre, dit BB-lilith, quand j’étais dans le central il y en avait pas autant.
Aeryn Sun nous montra cinq écrans.
— Ça m’a aussi pris du temps pour les trouver.
— Mais c’est chez moi, s’étonna Sandra. Et c’est moi, allongée sur le lit, avec les lunettes 3D.
— Beurk fit Enilis en se voyant, j’aime pas ma coupe de cheveux. Faudra que j’aille chez le coiffeur.
Ah les petits problèmes des filles ! Toute la planète peut sauter, si le rouge à lèvre n’est pas le bon, c’est la crise internationale majeure !
— Le bordel dans ta piaule, Blue ! qu’elle rigola Enilis. Et les posters de Japonaises. Purée ! C’est bien les mecs, ça !
Les autres rigolèrent. Les filles ne sont jamais contentes. On les affiche sur les murs de nos piaules, et elles trouvent encore à critiquer. Faudrait savoir ce qu’elles veulent.
BB-lilith nous regarda.
— Bon, ben l’aventure s’arrête là .
— Snif, snifa Sandra. Alors on zigouillera plus de zombies ?
— Mais si, s’excita Enilis, seulement faudra comprendre comment DRIMS fonctionne vraiment. Hein Lili ?
— Ouais, on trouvera. Alors dès qu’on est de retour, on se connecte tout de suite sur le chat et on s’appelle. OK ?
On approuva tous.
— Euh, que je fis remarquer, vous trouvez pas que c’est un peu facile, tout d’un coup ?
— Je pense pas, rassura BB-lilith, le fait que Sunny ait été blessée, c’était un hasard qui nous a permis de sortir.
Oui, mais le hasard existe-t-il dans DRIMS ? That is the question !
Aeryn Sun nous montra comment agrandir les écrans en portes.
J’aurais bien aimé retourner dans mon agence. Et j’avais manqué Yuu de peu. Super snif ! Mais je pourrai toujours revenir. Qui sait !
Un dernier regard aux filles et je traversai mon rectangle.
A peine dans ma chambre, je fus aspiré dans mon corps. Le cyberespace est bien en dehors de notre conscience.
Ah oui ! Et les autres ? Avec tout ça, on avait oublié Sami, Laraider… Quelque chose clochait, mais quoi ? Pourtant j’étais bien de retour dans la réalité. Non, je me faisais des idées.
Je retirai mes lunettes 3D. M’étirai. Baillai. Me levai.
Attends !
Je vérifiai mon radio réveil. On était bien le 7 juillet 2007. Je m’étais connecté à cette date, vers 21h. Et il était 21h. J’aurais dû marquer l’heure exacte. Mais à première vue, il ne s’était écoulé que quelques minutes, voire moins.
Je regardai autour de moi pour saisir des détails inhabituels. Rien. Tout semblait normal.
Je retirai le CD de DRIMS du lecteur. Il n’était même pas chaud. Le rangeai dans le boîtier.
Soudain je pressai ma chemise. Non ! Le magazine Pink Japon n’était plus là . Pareil pour les deux petites culottes prises dans le supermarché. Une preuve de plus que j’étais bien dans la réalité.
Vite !
Je me connectai sur le chat de messenger. Les pseudos des filles affichaient déconnectés. Bon, fallait leur laisser un peu de temps.
Je pris le CD du Sergent Peppers des Beatles, histoire de mettre un peu d’ambiance, et le lançai en mode aléatoire. Louchai sur l’écran du moniteur. Tapai « japonaise » dans google. Ben, euh, juste pour voir à quoi ressemble Tokyo. Je veux écrire une fic dessus.
La voix de John Lennon chanta :
— Picture yourself in a boat on a river with tangerine trees and marmelade skies… Somebody calls you, you answer quite slowly, a girl with kaleidoscope eyes…
Hein, mais attends ! C’est la chanson « Blue for you ! »… Et en réalité c’est « Lucy in the sky with diamonds ! » Comment ça se fait que je l’ai pas reconnue en la jouant sur le piano de John Lennon ? Encore un effet de DRIMS, je suppose !
Une heure après, les filles ne s’étaient toujours pas connectées. Il avait dû se passer quelque chose.