par Phantom_Blue » 08 Déc 2010, 10:49
BELGARION n'en revenait pas en lisant la fiche d'intervention à domicile, que son chef venait de lui remettre. Une intervention au manoir de Lara Croft pour une panne de téléphone.
— Dis donc, Winston est passé, qu'il envoya, il tient absolument que ce soit toi.
— Comment ça ? demanda Belgarion, abasourdi.
— Je ne sais pas, mais en tout cas tu dois avoir un ticket avec la belle Lara, c'est sûr, petit veinard.
Et il lâcha une rigolade spongieuse.
Depuis le dernier Tomb Raider, la célèbre Lara Croft avait disparu des médias. Plus aucune nouvelles. Elle s'était retranchée dans son manoir fermé comme une forteresse. Et après six mois, elle ressurgissait en le demandant, lui, Belgarion.
Il fut pris d'un vertige. Lara Croft le demandait. Lara Croft. La femme la plus merveilleuse, la plus fabuleuse, la plus… Les mots lui manquaient pour traduire son émotion.
Il se précipita dans sa camionnette de service TELECOM et fila chez lui. Le temps de prendre une douche, d'enfiler une combinaison neuve, de s'asperger d'eau de toilette, il fonça vers le manoir. Peut-être qu'elle avait besoin de lui pour une mission. Il était certainement l'opérateur informaticien le plus doué de sa génération, et Lara avait dû remarquer ses qualités. Lara, son prénom sonnait dans sa tête comme la plus douce des musiques.
Une fois arrivé devant le manoir, après avoir parlé dans l'interphone, il regarda les lourdes grilles s'ouvrir dans un bourdonnement de métal.
Puis il entra sous l'œil électronique des caméras de surveillance, roula sur le gravier de l'allée tandis que les grilles se refermaient. Il gara la camionnette devant le perron.
Debout sur les marches, le vieux majordome dans son costume à queue-de-pie l'accueillit d'une voix posée :
— Bienvenue au manoir, suivez-moi !.
Belgarion découvrit le hall, le cœur battant, impressionné par les lieux. Il avait conscience de vivre un moment unique, d'être privilégié, choisi par une main divine.
Winston le conduisit dans une pièce, se dirigea vers un bureau et lui montra une photo.
Intrigué, Belgarion contempla le visage de l'homme qui lui semblait familier, essayant de deviner où il l'avait déjà vu.
— Si je vous ai fait venir, commença le majordome, c'est en espérant que vous comprendrez la situation, et que vous voudrez bien m'aider. Bien entendu, vous serez largement rétribué. Si je vous ai choisi, c'est que vous ressemblez à Kurtis, un ami très dévoué de lady Croft. La panne téléphonique n'était qu'un prétexte, j'espère que vous voudrez bien m'en excuser, mais vous saisirez mieux en apprenant la situation difficile qui me préoccupe.
Belgarion n'en revenait pas en enfilant la tenue de Kurtis. Il devait jouer son rôle, le vrai restant injoignable. Lara déprimait. Une dépression grave, avait précisé Winston. Et seul lui, Belgarion, agent de télécommunication, avait une chance de la sauver.
Il ne put empêcher de se voir dans les bras de la belle aventurière, goûtant à ses lèvres pulpeuses, troublé par ses deux magnifiques… Il chassa cette image et préféra se concentrer sur l'instant présent.
Winston le conduisit au premier, ouvrit une porte et souffla :
— Faites pour le mieux.
Le cœur de Belgarion s'accéléra quand il entendit la voix sensuelle de Lara venant du lit à baldaquin, dont les voiles étaient baissés :
— Winston, c'est vous ? Apportez- moi du chocolat !
Le majordome désigna une boite de pralines sur la commode et referma la porte.
Belgarion était maintenant seul dans la chambre avec son héroïne. Il prit la boite et s'avança vers le lit, imaginant Lara en déshabillé, allongée sur les draps…
Quand un des voiles s'écarta et Belgarion poussa un cri de surprise.
C'était bien Lara Croft, mais à peine reconnaissable, avec des centaines de kilos en plus, le visage boursouflé, les joues gonflées, un triple menton, des seins énormes affaissés sur un ventre proéminent, des cuisses monstrueuses, des varices violacées lézardant ses jambes.
— Kurtis, mon amour, viens me faire un gros câlin ! s'exclama-t-elle en le voyant, les paupières à moitié ouvertes sur deux yeux globuleux, un filet de bave ruisselant de sa bouche aux dents cariées.
Belgarion dévala les marches quatre à quatre, traversa le hall en courant, franchit la porte juste au moment où une balle fusait au-dessus de lui dans un claquement détonant.
Il se retourna et vit Winston qui le visait avec une arquebuse.
Sa première idée fut de bondir dans sa camionnette, mais les clés étaient restées dans la poche de sa combinaison.
Il fila vers les grilles en espérant pouvoir les escalader, mais il n'eut pas le temps de mettre son plan à exécution.
Deux Dobermans noirs au poil luisant, les crocs féroces aboyant avec férocité, déboulèrent sur huit pattes musclées.
Belgarion sprinta vers le verger et réussit in extremis à escalader le dernier obstacle du parcours du combattant.
De là il sauta sur le suivant, plus élevé, et se retrouva sur le haut mur entourant le manoir.
Après quelques enjambées, il se laissa tomber de l'autre côté, et se lança sur le chemin, priant le ciel que les grilles restent fermées.
Quand il se heurta violemment à quelque chose. Il resta quelques secondes secoué par le choc. Puis il constata que le paysage était comme peint dans l'air, sur une sorte de mur invisible.
Le chemin s'arrêtait devant lui.
Il courut le long de cet étrange mur, qui faisait le tour du manoir, sans trouver une ouverture.
Et c'est en levant ses yeux qu'il vit l'incroyable. Une chose qui lui glaça le sang.
Un ciel noir, fermé, s'étendait au-dessus du manoir comme une mer d'encre.
— Ausecouuuurs ! cria-t-il. Sortez-moi de là !
Et dans notre série "La quatrième dimension", ne manquez pas le prochain épisode :
Les monstres du miroir