Petites chroniques de L'homme qui se recouche


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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Babou » 17 Juil 2008, 07:18


Ah, la télé est réparée. Image J'aurais mis ma main au feu pour Secret Story ! J'adore ces chroniques plus abracadabrantes les unes que les autres. Faudrait presque tout isoler !

Je suis tenté de le croire, bien que le top model en question dont je tairai le nom pour les raisons que l’on comprendra, n’arrive pas vraiment à m’égaler au niveau physique.
Allez, un indice. Et pis je regarde pas Secret Story alors je peux même pas me faire une idée. Image

Il s’agirait donc d’une tentative de clonage approximatif, ce qui me rassure quelque peu, l’original, à savoir moi, ne pouvant en aucune façon être dupliqué.
On peut pas dupliquer un fantôme puisque c'est immatériel. :15:

Je pense à Bob l’éponge, mais trop dangereux par temps de pluie, mon épiderme spongieux risquant de doubler, tripler, voire quadrupler de volume.
Comme les frites. J'essaye d'imaginer ce que donnerait au toucher un épiderme spongieux, ça doit être un peu comme celluliteux. Agréable ! :11:

Un instant je songe à Brad Pitt, mais je ne suis pas assez moche, il faudrait me défigurer avec une atrocité sans nom, renonçant ainsi à incarner l’idéal masculin dont rêvent toutes les femmes.
Loool :05:

Je vais me retrouver dans une impasse intellectuelle, prisonnier dans le Cube truffé de pièges d’une situation sans issue, quand l’idée qui résoudra le problème jaillit enfin dans mon esprit. Je me recouche, déguisé en lit.
Très bonne l'expression " déguisé en lit ". Sûr que je vais la retenir. Le lit, avec ou sans tête ? Image

Le temps de la grossesse sera ramené de 9 à 5 mois. Les retraités devront claquer à 50 ans. Les jeunes qui n’ont pas le BAC à 14 ans feront une formation obligatoire comme agent de sécurité de la force publique. Interdiction de pisser plus d’une fois par jour, sous peine de sanction grave.
Super les réformes ! 5 mois la durée de la grossesse, comme le mouton ou la chèvre. On peut dire que le monde futur sera peuplé d'agents de sécurité. Je n'ose pas imaginer la sanction grave. Là où j'étais avant, des fois tu pouvais lire sur des murs << défense de pisser ou d'uriner sous peine d'amende >>. Comme si y avait une différence. :02:

Et je reconnais le lieutenant Frank Columbo de la police criminelle de Los Angeles, dans son imperméable râpé aux ourlets des manches, qui me lorgne avec son œil narquois, un sourire de vieille poule de bar sur les mandibules. Il articule d’une voix presque joviale :
— Vous n’auriez pas vu ma femme ?

Eh ! t'as oublié sa pipe, bref, faut toujours qu'il " case " sa femme quelque part lui. Le dialogue (plus bas) est bien vu. :04:

— Une fois j’étais même déguisée en poisson surgelé dans un rayon de la Maxi Coop où vous faites vos courses, en espérant que vous me prendriez, mais vous ne mangez apparemment pas de poisson, et à cause de ça j’ai eu un rhume pendant trois jours.
Déguisée en surimi, ça collait mieux avec la tradition asiatique et donc le personnage, tu sais les bâtons oranges. :08:

Je mate la pub Neutrogena pour avoir une peau clean avec Kristin Kreuk, l’ex-fiancée de Clark Kent, qui dit d’une voix souriante : « Moi les points noirs, je voudrais dire stooop… ». Encore un message subliminal de l’organisation para-gouvernementale, pour supprimer tous les points dans les phrases, et ainsi déstabiliser le sens de mes chroniques.
Très bon. C'est Zemmour, si je me souviens bien, qui a une préférence, lui, pour le point virgule, car dit-il, il est placé entre le point et la virgule. Très drôle. Ben il aime particulièrement les phrases ainsi construites. Ni définitif, ni fugitif. Entre deux eaux, entre deux mots. Image

— Euh, oui, que j’explique, c’est un lot de serpillières achetées sur eBay, que j’avais transformé en imperméable, et que j’ai retransformé en serpillières. J’adore transformer les choses.
C'est peut-être à cause de ces conneries que eBay a eu un procès. Tes serpillières sont sûrement des contrefaçons. Etudie bien la fibre ... :14:

Tout a commencé un matin de printemps au château de Moulinsart, quand le professeur Tournesol a inventé une machine à brosser les imperméables…
Je sais pas si le professeur Tournesol a inventé une machine à brosser les imperméables, lol, ce que je sais c'est que toi t'as le don d'inventer, d'imaginer. C'est fou comment un simple imperméable peut prendre autant d'ampleur !! J'adore l'imperméable anonyme sur un cintre. Je cours vérifier ma penderie. Image

Je retourne devant mon poste de télévision mais après quelques clics insipides, je plonge entre les draps et me laisse dériver dans le courant du sommeil vers les îles bleues des mers du rêve ...
Et je me laisse dériver dans le courant du sommeil vers les mers bleues des îles du rêve :19:
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Phantom_Blue » 17 Juil 2008, 09:26


Chronique 11

L’OPG a encore frappé (l’Organisation Para-Gouvernementale, pour ceux qui n’auraient pas capté).
Plusieurs agents sont envoyés sur l’affaire. Napoléon Solo et Illya Kullyakin déguisés en Laurel et Hardy. Mister Bean déguisé en OSS 117. Les Charlie’s Angels déguisées en Totally Spies, et les Totally Spies déguisées en Charlie’s Angels. Buffy déguisée en Pippi Langstrumpf. Fox Mulder déguisé en Dana Scully. Ma mère avec un soutif gonflable déguisée en Lara Croft (mamaaaaan mais qu’est-ce que tu fous là ?). La reine d’Angleterre envoie plusieurs James Bond 007, à savoir Thimothy Dalton, Pierce Brosnan, Daniel Graig, David Niven et Sean Connery. Roger Moore, quant lui, enquête sous les traits de Simon Templar. N’oublions pas l’élégant John Steed, accompagné par la ravissante Emma Peel, tous deux déguisés en Chapeau de cuir et bottes de melon. Et quelques autres espions, anti-espions et barbouzes de tout poil venus d’Amérique du Sud, des States, d’Asie centrale, de Russie, des Indes orientales, de Stroumpf-les-bains et de Weyersheim-sous-forêt.
Campé devant le poste de télévision, je zappe pour obtenir des informations.
Mais rappelons les faits. L’affaire a commencé…

On sonne à la porte d’entrée. Si c’est encore un lieutenant Columbo, je vais m’énerver. Mon œil louche dans l’œilleton. Un imperméable flotte dans le couloir. Il a peut-être des informations. Je lui ouvre. Il s’engouffre dans le couloir dans un souffle d’imperméable qui se déplace en flottant.
— Où est-il ? qu’il demande d’une voix de tissu désespéré.
— Qui ça ?
— Le lieutenant Columbo ! J’ai suivi sa trace jusqu’ici ! Je suis son imperméable !
Alors là, pour lui expliquer, ça ne va être du gâteau. Je vais me lancer dans une narration détaillée, quand la sonnerie retentit de nouveau.
— Ouvrez ! dit une voix froissée. Je sais qu’il est ici.
J’ouvre avec prudence, laisse entrer un deuxième imperméable flottant.
— Que fais-tu là ? demande le premier imperméable.
— Reviens, je t’aime ! envoie le deuxième imperméable. Il ne te mérite pas, c’est un égoïste, il ne pense qu’à ses enquêtes, il ne se préoccupe même pas de savoir si tu es heureux sur son dos.
— Je veux lui donner une dernière chance. Peut-être qu’il mettra enfin une main dans une de mes poches. Et je connaîtrai de nouveau le plaisir.
— Tu te fais des illusions.
— Non, je crois encore en lui.
— Laisse-le, moi seul peux t’aimer à la folie.
— Cocooooo, où es-tu ? Je sais que tu es là ! Réponds !
Le premier imperméable fonce dans toutes les pièces, ouvre des armoires et revient.
Le deuxième imperméable, qui l’a attendu dans le couloir, le prend par la manche et murmure :
— Viens ! Nous allons discuter de tout ça calmement. Rentrons à la maison.
Ils sortent et descendent l’escalier en flottant.

Je referme la porte et file devant le poste de télévision. Recommence à zapper. Sur la chaîne Histoire, un placard annonce : « Le chef du gouvernement vous parle ! ». Un homme en noir et blanc avec une moustache, assis derrière un bureau, articule un speech sur la ligne de démarcation. Au bas de l’écran s’affiche la date : « 5 mars 1943 ». Il est clair que l’OPG a truqué la date. Le monde a été coupé en deux. Ce plan fait partie de la grande attaque. Mais où se trouve la ligne ? Je ne vais pas tarder à l’apprendre.
En allant pisser, la ligne apparaît sur le seuil des water closets. L’envie étant trop pressante, le bout de ma tong franchit la ligne de cinq centimètres. Aussitôt un grésillement très désagréable de papier émeri à gros grains frotté contre une surface dure se fait sentir dans mes orteils et mon pied.
Pendant que je pisse dans le lavabo, je réfléchis au moyen de la contrer. Dans la cuisine, en ouvrant le frigo, à mon plus grand étonnement je retrouve la ligne. Ma main ne parvient pas à s’emparer de la Danette au chocolat qui trône derrière elle, sur l’étagère.
Les mâchoires crispées par une colère à peine contenue, je fais le tour de l’appartement et repère la ligne à d’autres endroits, notamment au milieu du lit dans le sens de la longueur.
Je suis en train de cogiter avec une intensité jamais atteinte, quand mes yeux se posent sur le bloc de feuilles imprimées de lignes, acheté à la Maxi Coop. Une idée me vient à l’esprit.
Evidemment, il se trouve du côté inaccessible de la ligne. Mais il m’en faut plus pour me décourager. Avec une règle, je parviens à le faire passer du côté accessible de la ligne. Puis je fais craquer une allumette et je l’allume dans la baignoire.
Eurekaaaa ! Je ne m’étais pas trompé !
Toutes les lignes disparaissent. Ainsi ce sont les lignes des feuilles du bloc, qui à mon avis ont été activées par l’image du chef du gouvernement, qui à mon avis serait plutôt le chef de l’OPG, qui à mon avis est le chef du gouvernement et de l’OPG, qui à mon avis ne sont qu’une seule organisation divisée en deux, l’une anodine opérant en plein jour, et l’autre plus sournoise opérant dans l’ombre.

Ah oui ! La fameuse affaire. Bon, reprenons où j’en étais resté. Alors l’OPG a encore frappé. Plusieurs agents sont envoyés sur l’affaire. Napoléon Solo et Illya Kullyakin… Ah mais je l’ai déjà dit. Rappelons donc les faits. L’affaire a commencé…
Nouveau coup de sonnette. Décidément. Encore un autre lieutenant Columbo et son Basset Hound. Qui va apparaître, cette fois-ci ? Peut-être Angie Cyclone ! J’ouvre et les laisse entrer.
Le lieutenant Columbo me louche avec son œil narquois. Secoue ses tifs dont certains se recourbent en bouclettes. Je remarque aussitôt le détail fatal. Il ne porte pas d’imperméable. Il est en chemise blanche avec une cravate soldée, vu l’état de la cravate.
— Vous n’auriez pas vu un imperméable, par hasard ? qu’il me demande, un petit sourire de fouine sur les dents.
Un effroyable dilemme s’empare de mes pensées. Dois-je parler ? Qui aime qui ? Le premier imperméable est amoureux du lieutenant Columbo. Le deuxième imperméable est amoureux du premier. Le lieutenant Columbo est-il amoureux de son imperméable, le premier donc ? Le premier imperméable va-t-il quand même tomber amoureux du deuxième imperméable, oubliant le lieutenant Columbo ? Dans ce cas, si le lieutenant Columbo tombe amoureux de son imperméable, le premier donc, et que ce dernier vit le grand amour avec le deuxième imperméable, le lieutenant Columbo risque d’avoir le cœur brisé ? Et si le lieutenant Columbo tombe amoureux du deuxième imperméable, alors que le premier imperméable est amoureux du lieutenant Columbo ou du deuxième imperméable ?
En tout cas, apparemment, il s’agit du véritable lieutenant Columbo. Et puis après tout, qu’ils se débrouillent entre temps. Je crache :
— Oui, ils étaient là avant, ils sont repartis. Un des imperméables a dit : « Rentrons à la maison ! ».
— Alors il était aussi là, articule le lieutenant Columbo.
Son œil s’allume d’une étincelle brillante. Puis une larme dégouline en rafting sur sa joue.
De toute évidence, le lieutenant Columbo parle du deuxième imperméable, et vu l’étincelle brillante et la larme, il éprouve un sentiment à son égard.
Enfin il m’adresse un petit coup de tête souriant et sort sur le palier. Je vais refermer la porte quand il se retourne et demande :
— Que faisiez-vous dimanche 34 février 1999 à minuit ?
Surpris par la question, je bafouille :
— Euh, je crois que je m’étais recouché.
Le lieutenant Columbo secoue plusieurs fois sa caboche aux tifs dont certains se recourbent en bouclettes.
Puis il descend deux marches de l’escalier, s’arrête, se retourne une nouvelle fois, remonte les deux marches, me demande :
— Et vous n’avez rien remarqué de suspect ?
— Euh, non. Il faisait nuit.
Dans la série, le lieutenant Columbo peut revenir comme ça plusieurs fois, mais là heureusement il disparaît dans l’escalier.

Je referme la porte, entends venant de la cuisine une sorte de clapotement spongieux et saliveux entrecoupée de bruits de plastique frotté sur le carrelage.
Je me précipite et découvre la porte du frigo grande ouverte, et le Basset Hound en train de déguster ma Danette au chocolat.
Je l’attrape par le collier et le reconduis illico presto sur le palier, les babines pendouillantes toutes chocolatées.
Nan mais !
Là il y en a marre. Rompu de fatigue par toutes ces émotions, je me recouche.
Ah oui, la fameuse affaire !
On a volé la grande culotte taille 52 avec des élastiques renforcés autour de la taille et des cuisses de la reine d’Angleterre, la nuit dernière, à Buckingham Palace.
Sur ce, good night !
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Babou » 18 Juil 2008, 05:37


Ben voilà, je regarde plus la télé. Plus la peine. Je lis les chroniques tous les jours. J'ai même dû laisser tomber 20minutes.fr. car imaginez-vous que lorque j'ouvre ce lien, une fenêtre affiche désormais " site piraté ". Sûrement un coup de l’OPG (Organisation Para-Gouvernementale pour ceux qui n'auraient pas encore capté), ceci pour nous obliger à lire les chroniques ! Mais dans quel but ? Alors j'ai balancé ma télé du 3e étage, même que son petit fantôme électronique composé de particules pulsantes et joyeuses a rejoint le grand océan cosmique des particules pulsantes et joyeuses. Au fait, Columbo il fume la pipe ou le cigare ? Il fume ? Lol, je sais plus. Je confonds peut-être avec Derrick. Sous le bureau ovale parfois on se perd ... Monika, elle, s'est bien perdue ... dans l'odeur du cigare. Immanquablement ça nous amène à Cuba. Manque juste le goût de la Tequila et la salsa frénétique.

— Ouvrez ! dit une voix froissée. Je sais qu’il est ici.
J’ouvre avec prudence, laisse entrer un deuxième imperméable flottant.
— Que fais-tu là ? demande le premier imperméable.
— Reviens, je t’aime ! envoie le deuxième imperméable. Il ne te mérite pas, c’est un égoïste, il ne pense qu’à ses enquêtes, il ne se préoccupe même pas de savoir si tu es heureux sur son dos.
— Je veux lui donner une dernière chance. Peut-être qu’il mettra enfin une main dans une de mes poches. Et je connaîtrai de nouveau le plaisir.

J'adore le dialogue des imperméables. Voix de tissu désespéré, voix froissée mais parfois, pourquoi pas, une voix lisse et sans pli, ou soyeuse. Ou au contraire une voix plissée, mais c'est plus la mode, un tantinet ringard, actuellement la tendance serait plutôt une voix transparente. Et pis pour les poches, fallait bien trouver " un coin à plaisir " Image et y avait vraiment que ça. Des fois c'est une pochette surprise ... Mais au fait, ils se reproduisent comment ? Image

En allant pisser, la ligne apparaît sur le seuil des water closets. L’envie étant trop pressante, le bout de ma tong franchit la ligne de cinq centimètres. Aussitôt un grésillement très désagréable de papier émeri à gros grains frotté contre une surface dure se fait sentir dans mes orteils et mon pied.
Pendant que je pisse dans le lavabo, je réfléchis au moyen de la contrer.

Ce passage est d'une élégance folle ! Image

L’envie étant trop pressante, le bout de ma tong franchit la ligne de cinq centimètres.
Quand on commence à lire cette phrase, dans le contexte, le bout de .... on a peur pour toi. :13: Les tongs tu les portes comment ? avec ou sans lanières ? Parce que des tongs sans lanières c'est comme un string sans ficelle. :02: Pour la petite histoire : en Afrique et en l'occurence en Côte d'Ivoire on appelle ça des samaras. Mais dans un langage plus populaire ils appellent ça des << en attendant >>. Savez-vous pourquoi ? Ça veut dire tout simplement << en attendant d'avoir mieux >>, car c'est la chaussure du peuple.

Dans la cuisine, en ouvrant le frigo, à mon plus grand étonnement je retrouve la ligne. Ma main ne parvient pas à s’emparer de la Danette au chocolat qui trône derrière elle, sur l’étagère.
Les mâchoires crispées par une colère à peine contenue, je fais le tour de l’appartement et repère la ligne à d’autres endroits, notamment au milieu du lit dans le sens de la longueur.

C'est mieux que si elle était dans le sens de la largeur, auquel cas tu devras adopter la position foetus pour dormir. Ce qui risque de donner des récits encore plus extravagants, l'axe de ton cerveau n'étant plus dans le prolongement direct de ton corps. Note que la femme de Columbo pourra toujours te filer des tuyaux. En mode contorsionnisme elle excelle. Je parle yoga bien sûr. :19:

Je suis en train de cogiter avec une intensité jamais atteinte, quand mes yeux se posent sur le bloc de feuilles imprimées de lignes, acheté à la Maxi Coop. Une idée me vient à l’esprit. Evidemment, il se trouve du côté inaccessible de la ligne.
Evidemment. :11:

Un effroyable dilemme s’empare de mes pensées. Dois-je parler ? Qui aime qui ? Le premier imperméable est amoureux du lieutenant Columbo. Le deuxième imperméable est amoureux du premier. Le lieutenant Columbo est-il amoureux de son imperméable, le premier donc ? Le premier imperméable va-t-il quand même tomber amoureux du deuxième imperméable, oubliant le lieutenant Columbo ? Dans ce cas, si le lieutenant Columbo tombe amoureux de son imperméable, le premier donc, et que ce dernier vit le grand amour avec le deuxième imperméable, le lieutenant Columbo risque d’avoir le cœur brisé ? Et si le lieutenant Columbo tombe amoureux du deuxième imperméable, alors que le premier imperméable est amoureux du lieutenant Columbo ou du deuxième imperméable ?
Un vrai délire ! Mais c'est presque romantique. Attention à ne pas commettre d'imper pour la suite du récit (lire impair pour ceux qui captent mal). :14:
La parole se fait spontanément rythme dès que l'homme est ému, rendu à lui-même, à son authenticité. Oui, la parole se fait poème. (Léopold Ségar Senghor)
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Phantom_Blue » 09 Sep 2008, 09:36


Chronique 12

J’ouvre les yeux. Le lit flotte sur les vagues. Autour, l’océan roule nonchalant sous un ciel bleu saphir chargé de cumulo-nimbus blancs.
Et allongée à côté de moi, une sirène avec deux coquilles Saint Jacques sur les lolos et une queue de poisson en écailles luisantes.
— Angie Cyclone ! que je m’exclame. Vous, ici ?
— Nous sommes en dehors de la zone contrôlée par l’OPG.
— Vous êtes revenue.
— Je n’ai toujours pas défini qui vous êtes vraiment.
— Moi-même j’ai du mal parfois.
— Ne plaisantez pas, c’est sérieux.
— Mais c’est toujours sérieux.
— Votre mère a raison, vous êtes encore un gamin.
— Maman ? Vous connaissez maman ?
— Bon, il faut que j’y aille.
— Vous partez déjà ?
— Il le faut, mais nous nous reverrons.
Je n’ai pas le temps de prononcer les mots qui consument mon cœur. Angie Cyclone disparaît dans les vagues.
Je scrute la surface dans l’espoir de la voir réapparaître.
Soudain la gueule ouverte pleine de dents pointues d’un squale émerge près du lit, pointée menaçante vers moi.
Je recule, apeuré. Comme elle insiste, je lui assène un coup d’oreiller. Le squale le mord d’un claquement de dents claquantes.

Et je me réveille, l’oreiller éventré à la main, des plumes éparpillées sur le lit et le parquet.
Je note les nouvelles informations dans mon calepin. Il existe une zone non contrôlée par l’OPG. Angie Cyclone connaît maman. Mais le squale ? Mon raisonnement m’incite à penser qu’il s’agit d’un espion travaillant pour l’OPG, mais j’apprendrai plus tard qu’il est amoureux d’Angie Cyclone en sirène, et qu’une jalousie compréhensible l’a poussé à m’attaquer, mais ne brûlons pas les étapes.
Je téléphone à l’agence PubliStar de maman, où la secrétaire m’informe qu’elle est partie à Londres hier pour un défilé et qu’elle ne sera de retour que cet après-midi vers 15h.
Le reste de la matinée se passe dans un zapping sans grand intérêt, toutes mes pensées étant focalisées sur Angie Cyclone.

L’après-midi à 13h12, je prends le tram pour aller voir maman et lui demander des renseignements sur Angie Cyclone. Une affichette encadrée dans la rame attire mon attention.
« Doucement les basses ! Par respect et pour le confort de tous, merci de baisser le niveau sonore de votre lecteur mp3 ou de votre téléphone. L’usage d’appareils ou d’instruments sonores dans les véhicules est passible d’une amende de 4e classe, d’un montant de 144 euros. Décret n° 730 du 22 mars 1942. » (Affichette authentique.)
En 1942, les lecteurs mp3 et les téléphones portables n’existaient pas encore. Il s’agit donc de nouveau d’un coup de l’OPG pour créer le trouble dans les esprits et déstabiliser les consciences.
A la sortie du tram, centre ville, une horloge murale au coin de la rue de la mésange et des grandes arcades indique 13h53 alors qu’à ma montre, réglée sur le temps universel à un milliardième de seconde, il est 13h59. L’OPG cherche à freiner le temps dans le but de ralentir nos réflexes et nous plonger dans une semi-léthargie. Pour lutter contre la sensation d’engourdissement qui commence à envahir mes talons et mes mollets, je bois trois cafés serrés colombiens à la terrasse de l’Europ Snack, tout en essayant de recomposer le schéma d’ensemble des réalités.
Je prends comme base la Relativité d’Einstein, à laquelle j’ajoute les lois de symétrie et d’opposition et le principe des phènes du docteur Francis Lefébure, que je complète avec les états transpersonnels du neuropsychiatre John Lilly, inventeur du caisson d’isolation sensorielle, et je finalise avec le programme de synchronisation des deux hémisphères cérébraux de l’Institut Robert Monroe en Virginie. Bien évidemment, je supprime le mur de Planck qui n’a aucune raison d’être, les seuls murs étant ceux que l’on se construit dans la tête.
A 15h10, je débarque à PubliStar, où maman, resplendissante dans une robe en lamé or de Balanciaga, prépare la nouvelle campagne publicitaire pour la boisson gazeuse à la menthe Fresh Up. Deux assistants essaient d’attraper le ouistiti qui s’est perché sur une lampe sous le plafond, et qui doit jouer le rôle du ouistiti assoiffé dans la pub.
Et c’est parmi les grandes photos des top-models féminins affichées sur un mur, et qui ont posés pour l’agence, que je reconnais le cœur battant Angie Cyclone. Elle a été l’égérie des lingeries Lise Charmel. L’affiche me fait tressaillir de désir. Le blue turquoise flashy du soutif à balconnets et de la petite culotte échancrée contraste merveilleusement avec le satiné orange de sa peau d’une délicate douceur infinie.

Toujours prompte à résoudre toutes les situations les plus inextricables, maman agite la photo de la pub pour Rocky, une pub pour une marque de vêtements branchés djeunes, ou une véritable banane trône sur la tête d’un punky-rapeur. Aussitôt le ouistiti descend de sa lampe, attiré par l’illusion photographique du fruit, et se voit saisi par les doigts saisissants des deux assistants, ce qui n’est pas au goût du ouistiti, conscient d’avoir été dupé. Il le fait savoir en poussant des petits cris très stridulants.
— Maman, que je demande, tu connais Angie Cyclone ?
— Qui ça ? balance maman en gratouillant affectueusement l’espace inter-sourciller du ouistiti avec un index et un majeur vibromasseurs, toujours maintenus par les doigts d’un seul assistant, l’autre ayant jugé que son intervention n’était plus nécessaire, ce qui a l’air de plaire au ouistiti, puisqu’il n’émet plus aucun son dissonant.
— La fille de la pub Lise Charmel.
Je lui montre l’affiche sur le mur.
— Aaaah ! Elle ! Alicia Castavenia !
Durant une seconde qui s’éternise, je reste figé. Ainsi elle ne s’appellerait pas Angie Cyclone ? Remarque, à force de se déguiser, elle doit avoir plusieurs noms.
— Pourquoi, tu es amoureux ?
La question a fusé de la bouche de maman comme une claque de Bruce Lee.
— Euh, non, je voulais juste savoir.
— Ah bon ! Sinon je t’aurais donné ses cordonnées, mais comme tu n’es pas amoureux.
— Euh, ben…
Maman lâche un petit rire amusé.
— Ouiii ?
— Disons que…
Je n’aime pas ses situations relationnelles où je me retrouve en position dépendante et infériorisée, surtout face à maman.
— Euh, ben…
— Mais encooore ?
— Bon, ça va, que je m’énerve, c’est bon, ça va.
Maman tend l’oreille avec un lob où est clipé une boucle d’oreille en diamant scintillant.
Le ouistiti tend une oreille velue. L’assistant qui tient le ouistiti tend une oreille tendue. L’assistant qui ne tient rien tend une oreille avec trois anneaux. La secrétaire derrière son bureau dans le hall d’entrée de l’agence tend une oreille de secrétaire. Toute la ville s’est immobilisée et tend une oreille urbaine géante composée par les milliers d’oreilles tendues de tous les citoyens. La Terre s’est arrêtée de tourner et tend une oreille planétaire…
Une goutte de transpiration frontale s’attarde à tomber sur ma tempe droite. J’articule d’une voix presque inaudible :
— Je… l… ’... a... i... … … … m… … … … … e
Maman sourit et me souffle dans un souffle de maman qui sourit :
— Elle habite au 103 rue des acacias, dans le 12e…
Un courant d’air supersonique fait tourbillonner maman comme une toupie. Moi filant plus rapide que Speedy Gonzales au 103 rue des acacias dans le 12e.

Je traverse la ville en black cab conduit par un rasta dont les dreadlocks virevoltent à cause d’une tête agitée sur le dernier tube de Lorie qui passe à la radio. Enfin je débarque devant le 103 de la rue des acacias dans le 12e.
Horreur, stupeur et désolation en découvrant un immeuble abandonné aux volets fermés et à la porte condamnée par des planches clouées. Deux pigeons copulent frénétiques sur le rebord d’une fenêtre au premier étage.
Tremblant, je dégaine mon mobile et appelle maman pendant que le rasta pianote avec ses longs doigts jaunes nicotineux et kifés sur le volant.
Au bout du fil, maman rigole et envoie :
— Tu es parti tellement vite. Tu ne m’as pas laissé le temps de te préciser que c’était à Tokyo mais comme elle voyage beaucoup, du fait de son métier de top model, elle n’est pas souvent chez elle. Elle a un numéro où on peut la joindre, attends…
Et la batterie de mon mobile tombe à plat.
Super gasp et caranougats ripous !
Je m’engouffre dans le black cab qui fonce à PubliStar.
Le rasta me demande ce qui se passe. Je préfère rester discret, au cas où il ferait partie de l’OPG.
— C’est pour une femme ?
Ses yeux jamaïcains me scrutent dans le rétroviseur intérieur où pendouille une petite poupée de Betty Boop. Il rajoute avec une rangée de dents dans le désordre :
— C’est toujours pour une femme. Elles nous rendent complètement marteau dingo du ciboulot, mon frère. Avec elles t’auras jamais le dernier mot, crois-moi. Regarde ma troisième femme… blablabla…

Je m’éjecte du black cab devant PubliStar après avoir banqué un biffeton de 20 pour la course et fait cadeau de la monnaie.
— OK, mon frère, si t’as besoin d’aide, n’hésite pas, je suis Jimi Colibri, le mec qui laisse pas tomber les amis ! Je crèche de temps à autre Au Perroquet Vert, chez la grosse Irma, ma cinquième femme. Allez, à plus mon frère !
Je fonce dans l’agence. Maman n’est plus là. La secrétaire m’informe qu’elle est partie à Berlin pour un séminaire sur la communication.
Je m’empare du téléphone, compose le numéro de maman, tombe sur son répondeur. Inutile de laisser un message avec maman. Elle ne répond jamais aux messages, surtout aux miens. Elle estime que je suis assez grand pour prendre ma vie en main et me sortir tout seul des situations les plus inextricables. Je la rappellerai. Le téléphone raccroché, après quelques secondes de flottement dans un no man’s land mental, je cible la secrétaire, une petite brunette aux yeux hyper maquillés.
— Vous n’auriez pas par hasard le numéro de téléphone où on peut joindre Alicia Castavenia ?

De retour chez moi, après avoir discuté sur le palier avec la voisine sur la hausse des prix et la réduction des remboursements de la sécurité sociale, en zappant je tombe sur la pub du gel douche Fame. Non, je ne rêve pas, c’est bien Angie Cyclone, avec une longue chevelure rousse, les lolos enduits de mousse onctueuse. Une voix dit : « Faites comme Amandine Cartland, utilisez Faaaame ». Encore un nouveau nom !
Je retrouve et récupère la vidéo sur Dailymotion. Surfe sur le Net. Découvre une autre vidéo, une pub pour le parfum « Essence de Sens » de Loulou Désir, où Angie Cyclone, les cheveux mi-longs et noirs, humecte de plusieurs gouttes odorantes avec une grâce irréellement féminine son cou d’une perfection divine. Je ne vois aucun nouveau nom. Après un surf intense, et trois autres vidéos récupérées, dont un nouveau nom : Anaïs Chesterine, les zoeils commençant à clignoter, hanté par ce nouveau mystère, je me recouche.
Deux minutes à peine recroquevillé dans les draps, je me redresse dans le lit.
Le numéro de téléphone ! J’avais complètement oublié. C’est la conversation avec la voisine, ça m’est sorti de la tête. Est-ce que la secrétaire me l’a donné ? Euh… Je me précipite sur les poches de mon blouson. Trouve le post-it rose avec le numéro de téléphone. Mais oui, elle me l’a donné. Je me précipite sur le téléphone. Toute notre vie est faite de précipitations.
Longue sonnerie. Personne ne décroche. Je rappellerai à intervalles réguliers.
Et je me recouche.

Chronique 13

Emma Peel, moulée dans une combinaison moulante en sky noir brillante, garnie de tirettes éclairs, devant du cou au nombril, sur les avant-bras et le long des jambes, du talon au genou, furète d’un œil malicieux, le nez fripon, dans les coins et les recoins de la chambre de la reine d’Angleterre à Buckingham Palace, avec une grâce et une légèreté merveilleusement féminines.
Tandis que John Steed, son éternel chapeau melon posé sur un brushing impeccable, cintré dans un costume gris clair aux mensurations idéales de lord, ouvre les tiroirs d’une commode Henri VIII, et exhibe sur le bout de la pointe de son parapluie Chamberlain une guêpière rouge taille 58 des plus osées, garnies d’une série de jarretières terminées par des petits rubans fantaisie.
— Je ne savais pas que la reine donnait dans la frivolité populaire.
— Sa majesté est une femme comme les autres, répond Emma Peel en écartant une mèche de cheveux de sa joue droite, qui avait glissé quand elle s’était penchée pour voir sous le lit à baldaquin.
John Steed repose la guêpière dans le tiroir, un petit sourire dansant sur ses lèvres aristocratiques.
— Bon, miss Peel, je crois que nous avons fait le tour. Nous n’apprendrons rien de plus.
— Détrompez-vous, rétorque Emma Peel en examinant le rebord de la fenêtre.
Elle passe son index fin et arqué sur la boiserie, puis près de ses délicieuses narines, et chante d’une voix triomphale :
— Essence de Sens de Loulou Désir. Notre voleur de culotte est très certainement une voleuse.
— Et comment en arrivez-vous à cette déduction, miss Peel ?
— Tout simplement parce que j’ai aussi repéré ce parfum sur la poignée du tiroir de la commode dans lequel se trouvait la culotte.
— Mais ne serait-ce pas le parfum de sa très gracieuse majesté ?
— Elle se parfume exclusivement avec Rose Impériale de Saphira Duncan.
— Mais il pourrait s’agir du parfum de la femme de ménage ? Ou d’une servante ?
— Il est interdit au personnel de se parfumer.
— Je le savais, bien entendu, miss Peel, mais je voulais vous prendre en défaut.
Emma Peel lui adresse un petit sourire adorablement carnassier.
— Et je parie que vous allez donner l’âge de la voleuse ? rajoute John Steed, un rien ironique mais avec beaucoup de diplomatie gentlemaniaque.
— Mon cher Steed , Essence de Sens est un parfum utilisé en grande majorité par des femmes entre 25 et 27 ans, les adolescentes préférant les essences de framboise vanille, les vieilles rombières s’aspergeant d’eau de Cologne anti-bactériennes. Mais j’opterai pour une fille entre 17 et 19 ans qui veut brouiller les pistes.
— Miss Peel, votre science du raisonnement me déroutera toujours.
— Avouez que vous ne me croyez pas !
— Miss Peel, je me fie entièrement à votre intuition féminine, lance John Steed d’une voix chaleureuse, et vous préconisez quoi, maintenant ?
— Allons prendre une tasse de thé, nous aviserons ensuite.
— Très bonne idée, miss Peel, avec un verre de champagne.
— Cela va de soit, mon cher Steed.

Pendant que Milou copule frénétique avec Lassie et Benji, Rintintin n’ayant pas pu se libérer pour le tournage, filmé par Jean-Luc Godard, qui compte bien affirmer aux yeux du monde cinématographique les concepts de la nouvelle vague, à savoir la liberté d’improvisation sur un anti-scénario, Tintin feuillète les dernières nouvelles du Petit Marseillais et tombe sur un article dans les faits divers internationaux relatant la nuit dernière le vol de la culotte en latex de la chancelière
— Capitaine, nous sommes en présence d’une affaire des plus étranges.
Le capitaine Haddock, en pyjama décoré de Rackham le Rouge, sirote une tasse en porcelaine de whisky Jack Daniels sous le parasol arc-en-ciel à la table ronde sur la grande terrasse au rez-de-chaussée attenant au salon du château de Moulinsart, la barbe pâteuse, l’esprit encore embrumé par les vapeurs d’une nuit d’alcoolisation particulièrement intense.
— A l’abordaaaage !
— Doucement, capitaine, articule Tintin d’une voix jeune, claire et dans un excellent français de terminale L. Echafaudons d’abord un plan. Dans un premier temps, rendons-nous chez notre grande amie la Castafiore !
— Par les dents du grand requin blanc, pas chez cette vieille péronnelle de basse-cour !
— Justement, capitaine, je ne serais pas surpris qu’une de ses culottes ait disparu.
— Par les tentacules gluantes de la pieuvre géante qui a failli entraîner le Nautilus dans les abysses insondables ! Qu’est-ce qui vous fait penser ça ?
— Toutes les personnalités féminines d’un certain âge, qui occupent la scène internationale, ont une de leur culotte volée. Et la Castafiore me semble être une cible toute désignée.
— Mais quel malade voudrait s’emparer d’une culotte de la Castafiore ? Un collectionneur fétichiste masochiste ?
— Ou une collectionneuse.
— Une femme, dites-vous ?
— Ou une fille.
— Une fille ? Mais comment diable parvenez-vous à cette déduction ?
— Mon instinct infaillible de jeune reporter audacieux et intrépide qui n’écarte aucune possibilité. Et je peux même vous dire son âge.
— Par les burnes poilues de Barbe-Noire !
— Je dirai entre 17 et 19 ans.
— Expliquez-vous ! crache sidéré le capitaine Haddock, ses deux gros globes oculaires sombres de marin au long cours braqués sur le visage poupin et enjoué de son jeune ami à la houppe rousse.
— Cette nuit, pendant que vous festoyiez avec deux femmes de petites vertus, l’une étant un travesti…
— Un travesti ? s’exclame le capitaine Haddock, au comble de la suffocation.
— Exactement, capitaine, il y a des signes qui ne trompent pas, et qu’un œil averti sait déceler.
— C’est impossible ! Je m’en serais aperçu !
Le capitaine Haddock abat avec rage son poing sur la table ronde. Sa tasse en porcelaine, avec la larme de whisky qui stagnait au fond, valdingue sur les dalles de la terrasse et éclate en morceaux.
— Soyez beau joueur, capitaine, on ne peut pas gagner à tous les coups. Donc je reprends. Cette nuit j’ai calculé le thème astral de la reine d’Angleterre, l’inclinaison de l’axe de la Terre, et en me basant sur les quatrains de Nostradamus, les manuscrit de la mer Morte, le Popol Vuh et la Bhagavad Gita, il en est ressorti qu’un ange ayant tout juste quitté les désagréments de l’acné juvénile sèmera un vent de panique et le plus grand désarroi dans les royaumes du monde. On le reconnaîtra à des événements mystérieux se passant sous le nombril des anciennes génitrices trônant dans le ciel des hommes.
Il fallut au capitaine Haddock deux minutes quarante neuf secondes et une série de tapes accentuées dans son dos pour arrêter la toux belliqueuse qui venait de s’emparer de son gosier.
A cent mètres, dans le parc, près de la fontaine déversant une cascade d’eau trépidante, Jean-Luc Godard, la caméra à l’épaule, zoomant Milou entre Lassie et Benji (Rintintin ayant dû décliner le rôle, je l’ai déjà dit plus haut, mais je rajoute cette précision capitale pour la compréhension de cette histoire hautement thrillesque : à cause d’une chaude-pisse attrapée en urinant la patte levée sur des orties), balance avec une sérénité fébrile de metteur en scène innovateur :
— Plus frénétique, la copulation !

Pendant que Napoléon Solo roule une pelle à Illya Kullyakin au Sticky Fingers Bar de Bill Wyman bourré derrière son comptoir et rêvant à la bouche rose nacrée de Mandy Smith. Et que mister Bean repousse avec un rictus de gêne crispée sur les mâchoires les assauts répétés des Totally Spies dans un sauna thaïlandais de Carnaby Street.

Cette histoire au départ hautement intellectuelle risquant de déraper dans les marais glauques des pulsions préhistoriques génitales du cerveau reptilien, la volonté pourtant farouche de l’auteur ne pouvant pas toujours contrôler les débordements immatures des personnages, nous enchaînerons sur les vertus moralisantes du théorème de Pythagore, et ceci au risque de décevoir certains esprits portés sur la bacchanale joviale et les impertinences d’un libertinage dénué de toutes les règles de la droiture républicaine.
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Papofyse » 09 Sep 2008, 12:35


Salutatoi "ma poule", c'est encore du grand art ! :P mais ou tu va chercher tout cela !!!
Moi je crois que je vais en rester aux chroniques plutôt qu'aux "vertus moralisantes du théorème de Pythagore ..." bien qu'un peu d'ordre mathématique dans ma zone ne me ferais pas de mal !
C'est du pur délire et à la fois plein d'analogies ou de fil d'idées de base "réelles", plein de filigranes parfois développés au paroxysme, on peut se demander aussi si c'est une caricature de la vie réelle, l'agglomérat confus des rêves annoter au réveil ou bien une totale fiction, clairement imaginé par un esprit fertile ...
J'avoue que je suis perplexe, mais comme je te l'ai déjà dis, laisse tomber ce que tu fais actuellement et soit tu écrit les aventures d'un "Phantom Blue", ou bien adjoint toi un dessinateur et montez un projet, que tu as de la matière ...
La gouaille d'un Audiard avec des termes et des références actuelles, pratiquement des dialogues de la littérature d'espionnage/policière d'après guerre, avec une pointe de SA et SAS.
Je prend un pied phénoménal a suivre chaque "acteur" du scénarii et j'attends encore/déjà la suite !
Amicalement baille !
Le bal de laze, Good Bye Marylou, les sucettes à l'anis, Born to be a life, j'aurai voulu, j'ai tout oublié, Je ne veux qu'elle ...
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Babou » 12 Sep 2008, 05:45


on peut se demander aussi si c'est une caricature de la vie réelle, l'agglomérat confus des rêves annoter au réveil ou bien une totale fiction, clairement imaginé par un esprit fertile ...

Je pense que c'est un mélange de tout ça. Des trucs piqués dans les souvenirs, qui dérapent dans la fiction avec une imagination qui dépasse toute imagination, pour enfin tomber dans le pur délire.

A la sortie du tram, centre ville, une horloge murale au coin de la rue de la mésange et des grandes arcades indique 13h53 alors qu’à ma montre, réglée sur le temps universel à un milliardième de seconde, il est 13h59. L’OPG cherche à freiner le temps dans le but de ralentir nos réflexes et nous plonger dans une semi-léthargie.
Dans la théorie de Planck, il y a notamment la notion de temps, ce temps qui accélère et décélère en permanence. Si une seconde peut durer une éternité, toujours selon sa théorie, pourquoi dans l'absolu ne pourrait-elle pas durer 6 mn ? L'écart pile poil entre 13h53 et 13h59. Conclusion : c'est sûrement un coup de Planck. Il a avancé ta montre de 6 minutes ou retardé l'horloge. Je sais, c'est un peu tiré par les cheveux. Et si je me plante je m'en fout, je retourne me plancker derrière le mur :mur:

Je prends comme base la Relativité d’Einstein, à laquelle j’ajoute les lois de symétrie et d’opposition et le principe des phènes du docteur Francis Lefébure, que je complète avec les états transpersonnels du neuropsychiatre John Lilly, inventeur du caisson d’isolation sensorielle, et je finalise avec le programme de synchronisation des deux hémisphères cérébraux de l’Institut Robert Monroe en Virginie. Bien évidemment, je supprime le mur de Planck qui n’a aucune raison d’être, les seuls murs étant ceux que l’on se construit dans la tête.
C'est costaud !! Tout ce qu'on peut dire, c'est que toi tu fais pas dans la demi-mesure ! Mais di don t'es sciencé dè ! comme on dit en Afrique. Tiens la montre d'Einstein sera mise en vente aux enchères le 16 octobre. J'ignore le petit prix de départ :04:

Maman tend l’oreille avec un lob où est clipé une boucle d’oreille en diamant scintillant.
Le ouistiti tend une oreille velue. L’assistant qui tient le ouistiti tend une oreille tendue. L’assistant qui ne tient rien tend une oreille avec trois anneaux. La secrétaire derrière son bureau dans le hall d’entrée de l’agence tend une oreille de secrétaire. Toute la ville s’est immobilisée et tend une oreille urbaine géante composée par les milliers d’oreilles tendues de tous les citoyens. La Terre s’est arrêtée de tourner et tend une oreille planétaire…

Très bon. On ressent parfaitement l'humour voulu avec << L'assistant qui ne tient rien >>, lol, suite à celui qui tient quelque chose (le ouistiti). :15:

Enfin je débarque devant le 103 de la rue des acacias dans le 12e ......
— Tu es parti tellement vite. Tu ne m’as pas laissé le temps de te préciser que c’était à Tokyo mais comme elle voyage beaucoup, du fait de son métier de top model, elle n’est pas souvent chez elle.

Si c'est à Tokyo, comment as-tu pu te rendre réellement au 103 de la rue des acacias dans le 12e ? Image

Et la batterie de mon mobile tombe à plat ... Je fonce dans l’agence. Maman n’est plus là ... Je m’empare du téléphone, compose le numéro de maman, tombe sur son répondeur ... Longue sonnerie. Personne ne décroche.
Quand le hasard, qui n'est jamais hasard, se voit contrecarrer tes plans, d'une manière ou d'une autre, il ne faut jamais insister, c'est que tu dois pas de rendre au 103 de la rue des acacias dans le 12e. :non:

— OK, mon frère, si t’as besoin d’aide, n’hésite pas, je suis Jimi Colibri, le mec qui laisse pas tomber les amis ! Je crèche de temps à autre Au Perroquet Vert, chez la grosse Irma, ma cinquième femme. Allez, à plus mon frère !
C'est bien vu ça. La recherche associée à la logique. Image

Tandis que John Steed, son éternel chapeau melon posé sur un brushing impeccable, cintré dans un costume gris clair aux mensurations idéales de lord, ouvre les tiroirs d’une commode Henri VIII, et exhibe sur le bout de la pointe de son parapluie Chamberlain une guêpière rouge taille 58 des plus osées, garnies d’une série de jarretières terminées par des petits rubans fantaisie.
Oui, c'est surprenant. J'aurais plus vu des chapeaux dans ces tiroirs, et puis je la voyais pas non plus obèse. Guêpière = guêpe = 58. C'est mon équation. Cherchez l'illogique dans la logique ! Image

— Et je parie que vous allez donner l’âge de la voleuse ? rajoute John Steed, un rien ironique mais avec beaucoup de diplomatie gentlemaniaque.
— Mon cher Steed , Essence de Sens est un parfum utilisé en grande majorité par des femmes entre 25 et 27 ans, les adolescentes préférant les essences de framboise vanille, les vieilles rombières s’aspergeant d’eau de Cologne anti-bactériennes. Mais j’opterai pour une fille entre 17 et 19 ans qui veut brouiller les pistes.

Par extension puisqu'il s'agit du vol d'une culotte, ça me fait penser à la scène de la petite culotte entre Depardieu et Dewaert dans Les Valseuses quand ils essayent de deviner l'âge de la porteuse à coup de poussées olfactives répétées ! Je trouve cette scène se voulant drôle assez perverse. Image

— Par les burnes poilues de Barbe-Noire !
Très élégante cette phrase !! :D
La parole se fait spontanément rythme dès que l'homme est ému, rendu à lui-même, à son authenticité. Oui, la parole se fait poème. (Léopold Ségar Senghor)
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Phantom_Blue » 22 Oct 2008, 10:31


Spécialement dédiée à Papofyse

Chronique 14

Pourquoi je me retrouve dans la zone industrielle ?
Le ciel est couvert. Je marche sur le bord de la route. Il n’y a pas de trottoir. Ou plus exactement les parties trottoirs sont squattées par des bagnoles. Des bâtiments modernes à un ou deux étages s’alignent sur des carrés de terre fraîchement remuée. On se croirait à Brasilia au début des années 60, dans L’homme de Rio, quand Bebel cavale sur la terre rouge, au milieu des buildings en construction, porté par le souffle d’un monde futur en voie d’expansion.
Un mec sur un chariot élévateur tourne dans une cour encombrée de palettes. Je remarque une porte vitrée dans laquelle se reflète mon image de routard.
Un Berliet des transports TransSahariens ronfle sur la route. Des guerbas pleines d’eau ballottent sur ses flancs. Les pelles à sable attachées à l’arrière. Des cornes d’antilopes et un arc soudanais accrochés devant sur le radiateur. Il s’arrête de l’autre côté de la route.
Lino Ventura descend de la cabine. Marcel kaki et chapeau de brousse d’Indochine clipé.
L’après-midi s’éternise dans une vaste nappe d’air étalée comme pour un pique-nique. Les poteaux électriques en bois s’apparentent à des bâtonnets de Mikos glacés.
Lino allume une Gauloise et souffle un nuage de fumée dans lequel se dessinent des visages de jaguars et de fennecs.
Le Berliet lâche un soupir de métal liquide. C’est la mécanique qui décompresse, les pistons qui se détendent, le ventre du moteur qui roule des borborygmes.
Et c’est là que le rêve m’est revenu. Du moins une partie, la plus importante, celle où le magicien à la tête de lézard me dit de trouver l’indice dans la zone industrielle. Oui, mais quel indice ?
Je balaye le secteur avec des yeux de prédateur. Pas assez puissant. J’adopte les yeux de proie traquée. Place tous les sens en alerte de survie extrême. Facile. Il suffit de prendre le rôle du vermisseau candide pisté par 10,25 mantes religieuses affamées dans un mètre carré de verdure exubérante.
Et je remarque un papier de carambar sur le sol. Est-ce l’indice ? L’exercice a-t-il été payant ? Je le ramasse. Lis :

Une paire de lunettes, c’est deux monocles qui copulent frénétiques.

Oui, bon, me voilà bien avancé. Une paire de lunettes, c’est la vue. Donc voir. Oui, mais voir quoi ? Et ces deux monocles ? Faut-il voir deux choses séparées qui se rejoignent, s’assemblent, communient entre elles dans une extase orgasmique intensive ?
Une mouche passe en ligne droite. Sur un muret, un escargot avance en écoutant du swing avec un mini casque. Il est équipé d’une coquille de 120 gigas avec un écran de 3 pouces.
Il y a d’autres rues qui conduisent ailleurs, des ailleurs qui conduisent dans d’autres rues. J’aurais pu aller ici ou là. Les choses auraient-elles été différentes ? Peut-être. Peut-être pas. Je ne sais pas.
Pris dans mes pensées rêveuses, je sursaute. Lino a traversé la route. Il me dit :
— Bonjour, vous sauriez pas où on peut trouver un bistro ?
— Euh, bonjour, que je réponds, surpris. Un bistro ? Attendez ! Ah oui ! Dans l’autre rue, je suis passé devant.
Comme j’ai une envie de pisser, je l’accompagne.
— Je roule depuis quatre heures, j’ai le gosier desséché. La piste ça donne soif.
— C’est sûr, et vous allez où ?
— Je file sur Mars. Je dois récupérer des réacteurs pour le camion. Le temps de les monter, je décolle, je livre la marchandise et je vais me bronzer sur Paradis Land.
Je reste quelques secondes dans une flottaison de logique mitraillée par une image de camion volant vers la planète rouge.
— Paradis Land ? que je reprends, étonné.
— Vous connaissez pas ? C’est tout nouveau, ça vient d’ouvrir du côté de Jupiter. Une station orbitale gigantesque avec des piscines, des palmiers et tout le toutim. De quoi se refaire une santé.
— C’est sûr, les piscines et les palmiers, y a rien de mieux comme anti-stress.
— Et paraît que les filles se laissent regarder. De la Vénusienne Japonaise.
Un éclair de transpiration électrifiée d’adrénaline me traverse le bulbe rachidien.
— De la Vénusienne Japonaise ?
— Ouais, autre chose que Lulu la Nantaise. Du premier choix, tout juste sortie de l’emballage. Et pas farouche, du bon caractère quoi.
— Ouais, le bon caractère, y a que ça de vrai pour engager la conversation.
Lino esquisse un sourire en coin.
Une escadrille de jets passe dans le ciel. Laisse des traînées blanches sur le bleu azur. Une légère vibration secoue doucement le paysage.

« Aux Templiers », qu’il s’appelle, le bistrot. Le patron glande derrière un zinc, style espion de la zone russe à Berlin Est, une chemise blanche aux manches retroussées, des bretelles au drapeau anglais, un Playboy ouvert dans les doigts. Une blonde en bikini sur la couverture, que je connais mais dont le nom m’échappe. Un durillon sur la joue droite. Pas la blonde, le patron. J’oubliais la clope fumant au bec.
Lino se tale à une table sans nappe sur une chaise en bois. Je l’imite, remarque une affiche des Aventuriers avec la flamboyante Joanna Shimkus dans un coin.
Le patron rapplique en traînant des sandales sur les dalles. Balance un coup de tête en guise de bonjour.
— J’vous sers quoi ?
— Une bière avec un schnaps, envoie Lino.
J’aurais préféré un soda, mais bon. Evitons les boissons de femmes, ça pourrait faire jaser.
— Pareil pour moi.
Une blatte cavale speed entre deux tables. Le reste du bistro est vide.
— Y’a pas grand monde ! balance fort Lino.
Campé devant le percolateur, un bock à la main, le patron fait couler la bière mousseuse.
— C’est toujours une heure creuse mais ils vont pas tarder, qu’il répond en remplissant un deuxième bock.
Je louche sur ma montre. 11h59.
Le patron ramène les deux bocks et deux verres de schnaps.
Lino prend le verre et le laisse tomber dans le bock. Oui, là c’est sûr, ce sera bien mélangé. Puis il s’envoie une coulée derrière le Marcel.
Je siffle une petite gorgée de bière, goûte le schnaps, grimace. Des larmes me dégringolent des zieufs.
— C’est du brutal, que je commente. On sent comme un goût de pommes.
Lino rigole.
Le patron allume une petite télé au-dessus du comptoir. Le sigle de l’ORTF jaillit en noir et blanc sur l’écran. Puis Catherine Langeais speeche les programmes. Et c’est parti pour un épisode de Thierry la Fronde.
La porte s’ouvre et une sorte de hippie avec un bandana rouge entre, un blouson en cuir râpé, des tiags pointues aux arpions.
— Salut, qu’il chante,
Quand il file au comptoir, y a Stoorne marqué en lettres métallisées sur son blouson dans le dos. Il se planque sur un tabouret et commande une Anisette, double.
La porte s’ouvre de nouveau et quatre ouvriers en salopettes débarquent avec des godillons de sécurité et des bras poilus tatoués, des poussières de plâtres dans les tifs en désordre.
— Y’a un dépôt qui a sauté ce matin, dit un grand ventru au patron. On déblaye encore.
— Encore un coup de l’OPG, crache un autre, plus maigre, une bagouze rutilante au majeur gauche.
La recherche de l’indice me revient en mémoire.
Ils se campent debout au comptoir. Le patron aligne des demis. La bière dévale dans les gosiers.
Lino termine son bock et en commande un deuxième avec un autre schnaps. Le patron les ramène et embarque les verres vides.
Le hippie s’est retourné. Il me jette un œil. J’hallucine. Il porte un monocle. Un sourire étire sa bouche.
Puis il reprend la conversation avec le patron.
Le grand ventru lorgne Lino, accoudé au comptoir. Il beugle :
— On s’est pas déjà vu quelque part ?

C’est là que je reconnais la blonde sur la couverture. Angie Cyclone. Comment j’ai pu la zapper ? Il faut que je prenne le Playboy, mais c’est le hippie qui le feuillète.
Et ça va pas être évident, avec la bagarre qui vient d’éclater.
Lino a déjà mis deux ouvriers sur le carreau. Il envoie une manchette au troisième. Le quatrième lui décoche un poing dans les mâchoires. Lino recule, percute le mur, se ressaisit et réplique avec un uppercut dans le foie.
L’ouvrier se plie en deux, une grimace de douleur éclatée sur les dents.
Le patron regarde sans moufter. Sur l’écran, Thierry roule un kiss à Isabelle.
Le hippie s’est levé et file vers les pissoirs avec le Playboy.
Je bondis de ma chaise. Faut que je le récupère. C’est certainement l’indice.
Le couloir est sombre. Un talon de tiag disparaît au bout. Je sprinte. Tourne le coin. Tombe sur un mur de briques.
Il a du passer à travers. Y’a peut-être un truc qui pivote. Je pousse sur les briques. Elles résistent. Je laisse béton. Retourne dans le bistro.
Il est vide. Le patron essuie tranquille un verre derrière le comptoir.
Sur l’écran Nounours remonte l’échelle de son nuage. Le marchand de sable envoie une volée de sable doré dans l’air.
Le sable tombe du plafond. Des grains touchent mon visage, mes mains. Fondent avec une sensation de froid.
Une fatigue s’empare de moi. Je clignote des yeux. Dans tout ça, j’ai oublié de pisser.
Et tout s’efface.
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Papofyse » 23 Oct 2008, 01:46


J'adore ...
T'es au top, quoi dire de plus (d'autres s'en chargeront) Toutes les références qui me plaisent, y a pas, discuter une petite soirée avec toi te permet de stocker et cibler mieux ta "victime", ce qui est bien c'est que toi aussi tu aime cette période et ses gens, sinon tu n'aurai pas la matière et l'envie de le faire !
Je t'envie, j'aimerais écrire aussi facilement ... moi je ne passerai pas mon temps sur les forums ('fin si t'en passe) mais plutot à l'écriture d'un roman ...
En plus quelque part, tu écrit comme le faisait forton et tu déssine un peu à la manière de pellot, génial ! je suis client mais visiblement peut être déjà d'une autre époque !
N'hésite pas, lache toi (moi demain je te cafte a titi (le hippie) hé hé hé) c'est toujours un plaisir de te lire M.
Baille et Salutatous !
Le bal de laze, Good Bye Marylou, les sucettes à l'anis, Born to be a life, j'aurai voulu, j'ai tout oublié, Je ne veux qu'elle ...
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Babou » 24 Oct 2008, 06:33


Une histoire où il n'y a pas de frontière, on traverse les époques et les dimensions d'un coup de plume magique et parfaite. Du rêve haut en couleurs. Mais un vendeur de rêves n'est-t-il pas celui qui en a le plus besoin ?

Un italien (Lino) au volant d'un camion français (Berliet) et fumant des cigarettes françaises (Gauloise) roule sur une piste africaine. Il passe par le Soudan et soudain il a une hallucination ..... il voit des têtes de jaguars et de fennecs .... Le fennec ne se conjuguant pas avec le jaguar (ils ne cohabitent pas ensemble), il a une double hallucination, forcément. Double = Bi = binocle. Binocle divisé par 2 = monocle, non, là c'est mon imagination qui s'envole, portée sans doute par le vent du désert de sable ... Image

Un Berliet des transports TransSahariens ronfle sur la route. Des guerbas pleines d’eau ballottent sur ses flancs. Les pelles à sable attachées à l’arrière. Des cornes d’antilopes et un arc soudanais accrochés devant sur le radiateur. Il s’arrête de l’autre côté de la route.
Lino Ventura descend de la cabine. Marcel kaki et chapeau de brousse d’Indochine clipé.
L’après-midi s’éternise dans une vaste nappe d’air étalée comme pour un pique-nique. Les poteaux électriques en bois s’apparentent à des bâtonnets de Mikos glacés.

On est en Afrique mais où ? Au Soudan ? A cause de l'arc soudanais. Si c'est le cas, dur cette vision des glaces Mikos, mirage de poteaux, pour un des pays les plus pauvres et pour un peuple qui crie famine, encore plus dur car l'hélianthe ne pardonne pas et le rêve des bâtonnets glacés risque bien de fondre dans ce décor sahélien. Image

Lino allume une Gauloise et souffle un nuage de fumée dans lequel se dessinent des visages de jaguars et de fennecs.
Je pense que le jaguar est uniquement dans le moteur du camion. :15:

Place tous les sens en alerte de survie extrême. Facile. Il suffit de prendre le rôle du vermisseau candide pisté par 10,25 mantes religieuses affamées dans un mètre carré de verdure exubérante.
Pisté par 10,25 mantes ! :23: J'ai jamais vu des mantes religieuses avec des décimales, ni aucune autre espèce animale d'ailleurs. Sauf peut-être le grand solitaire qui, lui, peut se diviser en anneaux. Image

Une paire de lunettes, c’est deux monocles qui copulent frénétiques.
Lol, et en permanence. Image

Sur un muret, un escargot avance en écoutant du swing avec un mini casque. Il est équipé d’une coquille de 120 gigas avec un écran de 3 pouces.
3 pouces c'est pas le pied, Image mais bon c'est à sa mesure.

J’aurais pu aller ici ou là. Les choses auraient-elles été différentes ? Peut-être. Peut-être pas. Je ne sais pas.
Non, les choses n'auraient pas été différentes, le destin finit toujours par nous rattraper. Image

Je siffle une petite gorgée de bière, goûte le schnaps, grimace. Des larmes me dégringolent des zieufs.
On veut jouer les durs << Evitons les boissons de femmes, ça pourrait faire jaser. >> mais en définitive on a pas suffisamment d'estomac. :11:

— C’est du brutal, que je commente. On sent comme un goût de pommes.
La pomme ça n'a jamais été brutal, sauf si on la conjugue avec le verbe tomber. Image

— Je file sur Mars. Je dois récupérer des réacteurs pour le camion. Le temps de les monter, je décolle, je livre la marchandise et je vais me bronzer sur Paradis Land.
— Vous connaissez pas ? C’est tout nouveau, ça vient d’ouvrir du côté de Jupiter.
— Et paraît que les filles se laissent regarder. De la Vénusienne Japonaise.

Et pour terminer, en exclusivité : une vénusienne à la conquête de Mars ...
:19: :19: :19:

http://img516.imageshack.us/my.php?imag ... nnegr7.jpg
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Re: Petites chroniques de L'homme qui se recouche

Messagepar Phantom_Blue » 24 Oct 2008, 09:47


Pour apporter quelques précisions, il s’agit du film « Cent mille dollars au soleil ». Il est en entier sur :
http://www.dailymotion.com/relevance/se ... %2Bdollars

Le jaguar est l’animal dieu d’Amérique du Sud. Le cousin de ma mère, qui habite Cayenne, m’en avait parlé. Il aura un rôle à jouer dans la suite de l’histoire.

10,25 de mantes religieuses. Une mante à elle seule est déjà super féroce. Alors 25% de mante, c’est déjà très féroce.

J’aurais pu aller ici ou là. Les choses auraient-elles été différentes ? Peut-être. Peut-être pas. Je ne sais pas.
Non, les choses n'auraient pas été différentes, le destin finit toujours par nous rattraper.
Si on projette d’aller voir un film au cinéma à 20h30, et qu’il est 16h, et qu’on va voir le film, le résultat sera toujours pareil. Mais le parcours entre 16h et 20h30 peut varier. On peut aller casse-daller au Mac Do, ou se balader en ville, rencontrer telle personne, ou ne rencontrer personne. A 20h30, on sera au cinéma, mais entre-temps il peut se passer plein de choses.

— C’est du brutal, que je commente. On sent comme un goût de pommes.
La pomme ça n'a jamais été brutal, sauf si on la conjugue avec le verbe tomber.
C’est la fameuse réplique dans la scène de la cuisine du film Les tontons flingueurs, quand ils dégustent la gnôle.
http://www.dailymotion.com/relevance/se ... flingueurs
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