par Phantom_Blue » 22 Juin 2009, 18:48
Épisode 8
John et Lara avaient laissé la Bentley au milieu du chemin. Ils s'enfoncèrent dans les taillis entre les arbres.
Lara portait sa tenue de chasseuse de tombes avec son petit sac à dos. Deux Desert Eagle enfoncés dans des holsters fixés sur ses cuisses. Elle tenait une machette à la main.
Enfin elle retrouvait son goût pour l'aventure, même si la jungle s'apparentait au bois de Cantburry.
Fasciné, son chapeau melon blindé sur la tête, John la suivait dans son costume en tweed coupé sport, un parapluie à la main, écartant avec élégance les branches basses.
Ses yeux se posaient parfois sur le short rebondi aux muscles fessiers qui bougeaient avec grâce et force sous le tissu.
Lara constata que l'air devenait plus pesant au fur et à mesure qu'ils se rapprochaient du centre du pentagramme.
A sa connaissance, le bois de Cantburry n'avait pas d'histoire particulière. Mis à part une légende parlant d'un peuple de lutins qui vivait sous la terre. Certains promeneurs prétendaient avoir entendu des bruits étranges venant du sol.
La végétation s'épaississait. Lara avait deviné juste en emportant sa machette. Elle tailla à grands coups dans les feuillages, libérant le passage.
Soudain elle s'arrêta, dégaina un Desert Eagle de sa main gauche et plomba une vipère qui se faufilait vers ses rangeos. Une deuxième vipère fit les frais d'une balle. Quatre vipères plus loin, toutes éliminées direct d'une balle en pleine tête, Lara attendit quelques secondes, tira dans les buissons, estima que le terrain était dégagé et rengaina aussi vite qu'elle avait dégainé.
— C'est bon, John, la voie est libre.
— Presque, chantonna-t-il.
Lara se retourna et vit l'agent secret de sa Majesté, brandissant son parapluie en l'air, le bout en métal planté dans la gueule d'une vipère qui se tortillait.
Il l'envoya voler par-dessus les buissons dans un geste sec avec un sourire éminemment fair-play.
Une masse végétale composée de branches entremêlées comme un grillage se présenta devant eux.
En une vingtaine de coups de machette furieuse, Lara dégagea une ouverture et découvrit le bord d'un puits.
— Voilà donc le centre du pentagramme, lança Steed en s'approchant.
Lara dirigea le faisceau d'une lampe torche à l'intérieur. On distinguait au fond une plaque qui le fermait.
— C'est bien ce que je pensais, dit-elle.
Elle prit son sac à dos et s'empara d'un cube de C4 et d'un minuteur.
— Vous croyez que ce sera efficace ? demanda John.
— On peut toujours essayer, sinon j'ai une seconde parade.
— Oui, mais si elles ne réussissent pas ?
— Ça m'étonnerait, vous ne les connaissez pas.
— Mais au cas où ?
— Alors priez le ciel pour qu'il nous vienne en aide.
Debout devant la fenêtre de sa chambre, Krystos regarda John et Emma s'éloigner dans l'allée à bord de la Bentley. Elle franchit les grilles ouvertes du manoir. Winston les referma et verrouilla la serrure.
— Tu vois, tu n'avais pas besoin de t'inquiéter. Ils sont partis. Emma m'a dit qu'ils passaient juste avant de filer au Loch Ness. Comme Lara a vu une fois le monstre, Steed voulait des infos dessus. Ils veulent le capturer pour l'exposer au London museum. Et puis Lara a tout de suite accepté une autre séance pour cette nuit. Bon, elle était un peu réticente quand même, mais elle veut aller jusqu'au bout, elle l'a elle-même dit, elle veut percer ce mystère. Tu la connais, c'est une aventurière, elle n'abandonne jamais.
Assise dans un fauteuil devant une table basse, Babou retira le bout filtre d'une Marlboro. Elle déchira un ticket de bus en deux. Roula une moitié en petit cylindre et l'inséra à la place du bout filtre. Puis en pressant et en tapotant la cigarette, elle vida la presque totalité du tabac sur une petite feuille blanche avec un pli au milieu, en laissant un peu de tabac au fond.
Elle s'empara d'un stick vert sombre en forme de carambar et passa la flamme de son briquet sur un bout. Krystos s'était assis en face d'elle et observait la dextérité des gestes précis.
Ses doigts effritèrent le bout chauffé. Des miettes tombèrent sur la feuille, dans le tabac.
Elle procéda à un mélange, prit la feuille, la plia presque et engagea un coin dans le cylindre vide de la cigarette pour le remplir d'un centimètre environ.
Avec le bout plat d'un stylo fin, elle tassa le tabac et les miettes vert sombre. Elle remplit la cigarette d'un nouveau centimètre. Tassa une nouvelle fois avec le plat du stylo. Et ceci presque jusqu'au bout, laissant un demi-centimètre de papier vide. Qu'elle ferma en le tordant.
— Je vois que tu n'as pas perdu la main pour rouler une pakistanaise, complimenta Krystos.
— C'est comme le vélo, chanta Babou, quand on a roulé une fois, on sait rouler pour la vie.
Elle alluma la cigarette, pompa une bouffée de fumée et la passa à Krystos. Puis elle exposa la situation :
— Il faut terminer la séance. Seuls les quatre points telluriques ont été activés. Il reste le cinquième, celui du manoir de Croft, le dernier sur la liste, la pointe la plus haute. Sinon le passage ne pourra pas s'ouvrir.
— Oui, souffla Krystos, son regard devenant caméléonesque après une longue aspiration. Mais j'aimerais bien que tes esprits ne s'en prennent pas aussi à moi.
— Il le faut, sinon ça paraîtrait suspect. Et puis ils doivent te trouver à leur goût. Un peu de patience, encore une séance, et nous deviendrons les maîtres du monde. Tu règneras en pharaon, et je serai Cléopâtre.
— Mouahahahaha ! rigola Krystos, les yeux rougeoyants. J'imposerai Abba en permanence sur toutes les stations radios. Le port obligatoire du kilt pour les garçons. Et le H en vente libre dans les pharmacies et remboursé par la sécurité sociale. Mouahahahaha !
Le mobile collé contre l'oreille, Claire écoutait avec attention, soufflant un "oui" de temps à autre.
Au bout de dix minutes, elle s'écria joyeuse :
— Oui, j'ai tout compris… Eh ben c'est Fifi qui va être aux anges !… OK, on fait comme ça, t'inquiète pas, Lara, on sera sur le terrain, tu peux compter sur nous… A plus… Bisous…
Et elle coupa la communication.
— Pourquoi je vais être aux anges ? demanda Séraphine, vautrée dans un fauteuil, un paquet de Chips ouvert sur les genoux, le cinquième tome du manga Hellsing dans les doigts.
Elle lisait le passage où Victoria Sales, la petite vampirette blonde, éclate la tête hideuse d'une goule en la rafalant à bout portant avec un FM. Des jets d'encre noire inondaient la case.
Claire lui raconta pour le marquis et la comtesse, les cinq manoirs, le pentagramme, le puits, la nouvelle séance de spiritisme pour cette nuit.
— Géniaaaaaal ! hurla presque Séraphine en jetant son manga en l'air. On va destroyer des monstres tout gluants venus de l'enfer !
— Doucement, calma Claire, c'est qu'en deuxième partie, s'ils arrivent à sortir du puits. Et s'il y a des monstres ou je ne sais pas quoi qui sort du puits.
— C'est obligé ! Arrête, ne me fais pas de fausses joies !
— Toi alors, tu ne changeras jamais.
— Hihihi ! Bon, faut se préparer ! Je prends l'artillerie de base, les bazookas aussi, peut-être le lance-roquettes, t'en penses quoi ? oui, vaut mieux ! Et puis pour le reste, on improvisera ! J'adore improviser, ça fait monter des frissons trop terrifiants dans le soutif !
— Oui, mais avant de frissonner du soutif on fonce à la bibliothèque de Londres. Lara nous a demandées de faire des recherches sur le bois de Cantburry.
— Pfffff ! souffla Séraphine. Encore un truc d'intello. J'ai horreur de ça. Je suis une fille d'action, moi.
— Ça va, rigola Claire, un peu de lecture te fera le plus grand bien.
— Ben j'en fait, de la lecture, je lis des mangas. Si ça c'est pas de la lecture. M'enfin !